Aider son enfant à réussir à l'école

mer, 08/31/2016 - 13:34 -- siteadmin

Quelques règles simples permettent aux parents de trouver leur place pour accompagner l'élève sans l'envahir.

Freud lui-même avait prévenu: le métier «d'éduquer» ses enfants? «Impossible». Depuis son siècle, la situation ne s'est guère améliorée pour les parents. On parle même désormais de «burn-out parental» concernant ceux d'entre eux qui, voulant bien faire, s'épuisent littéralement - et notamment le soir, après avoir accompli leur propre journée de labeur - à multiplier leurs efforts pour que leur enfant réussisse bien en classe.

Pourquoi tant d'interventionnisme? Les menaces de chômage ou de déclassement pour les générations futures ; la compétitivité accrue dès la maternelle ; la perpétuelle remise en question, depuis des décennies, de l'institution scolaire qui peine à se réformer ; la prolétarisation du métier d'enseignant… Il faudrait être sourd et aveugle - ou dangereusement indifférent - pour ne pas sentir la pression nous invitant à être de plus en plus présents auprès de ces élèves que sont nos enfants. Mais n'ayant pas été formés pour cela, que pouvons-nous - à notre échelle - faire pour les aider vraiment? Pour y parvenir, les parents se doivent désormais d'endosser plusieurs rôles.

  En «coaches»: créer le contexte favorable à l'étude

Les psychologues, désormais sollicités fréquemment par des parents désorientés (près de 80 % des demandes de consultation sont liés à un problème à l'école), semblent tous d'accord sur un premier point: aux adultes de la famille il revient d'abord de créer le contexte favorable aux apprentissages et à l'équilibre de l'enfant. «Ce sont souvent des règles d'hygiène de vie pleines de bon sens que nous sommes amenés à rappeler, observe le pédopsychiatre Alain Braconnier, qui vient de publier L'Enfant optimiste. En famille et à l'école (Ed. Odile Jacob). Avant, il nous fallait traiter des enfants atteints de troubles psychiques, désormais il faut prendre soin de ceux qui vont bien, mais dont on craint qu'ils puissent aller mal ou multiplient les échecs.»

Dans cette quête de l'enfant «équilibré», les parents sont à envisager un peu comme des «coaches». Par leur style de vie, ils peuvent en effet installer certaines habitudes dont les bienfaits sont connus: une alimentation variée, une activité sportive, une pratique artistique… Les champs extrascolaires permettant à l'enfant de développer des potentiels lui servant indirectement en classe. Mais, désormais, de nouveaux enjeux doivent aussi être pris en compte.

Les problèmes d'endormissement et de réveils nocturnes se retrouvent chez 10 % des 6-12 ans et15 à 20 % des ados, et les parents ont à transmettre une véritable éducation au sommeil, à base de conseils au quotidien: «le lit restera un espace de calme et de repos où l'on ne doit ni manger ni étudier, poursuit le praticien ; on apprendra à repérer les signes physiologiques de l'entrée dans un nouveau cycle de sommeil ; à se créer des sas de relaxation avant la nuit.» Il convient de juguler désormais la dette de sommeil dont souffrent, en classe, de nombreux élèves et qui, bien évidemment, impacte leur capacité de concentration et mémorisation.

Directement mis en cause dans ce manque de sommeil, l'usage des écrans et des nouvelles technologies. On sait désormais qu'il n'est pas question de le diaboliser, de l'empêcher, mais qu'il importe de le réguler. Aux parents de savoir reconnaître la formidable utilité d'internet: quand l'enfant cherche, surfant de site en site, une information pour un devoir ou partage ses révisions avec d'autres élèves… Mais à eux aussi de donner un cadre à cet usage qui, sans cela, s'avère dévorant: pas d'écran allumé une heure avant d'aller au lit ; pas de SMS pendant le repas familial… À chacun d'instaurer les limites qui conviennent à la personnalité, à l'âge de son enfant… et à chaque membre de la famille. Autre argument favorable à la modération «technologique»: les enfants ont besoin de temps de rêverie, d'ennui, de vide… pour mieux apprendre ensuite. «Même quand il ne “travaille” pas, le cerveau est actif, rappelle le Pr Francis Eustache, président du conseil scientifique de l'Observatoire B2V des mémoires. Mais il a besoin d'être au repos - ce qu'on appelle le “mode par défaut”. Les moments où nos enfants peuvent laisser divaguer leurs pensées, se “faire des souvenirs” sans être hyperstimulés sont très importants car ils leur permettent de prendre du recul et d'intégrer sur un autre mode toutes sortes d'informations.» Dans un même esprit, de nombreux chercheurs et psychologues recommandent désormais d'initier les jeunes à la relaxation ou à la méditation.

  En précepteurs: renforcer le désir d'apprendre de l'enfant

S'impose ensuite la question des apprentissages scolaires eux-mêmes. Dans quelle mesure les parents, qui n'ont pas à jouer les «enseignants bis», peuvent-ils se transformer en répétiteurs réellement aidants pour leurs enfants? L'appui que l'on peut apporter aux jeunes ne doit en effet ni tuer leur capacité à être autonomes dans leur travail ni amoindrir leur désir d'apprendre… Vaste chantier que de nouvelles méthodes (pédagogie positive, discipline positive, ateliers «d'éducation empathique»…) visent à faire avancer au mieux, car le travail à la maison est trop souvent l'occasion de conflits et de crispations dans les familles.

«Certains adultes entrent alors dans des rapports de force avec l'enfant, observe Béatrice Sabaté, psychologue clinicienne et formatrice en discipline positive. Ils veulent que le jeune fasse selon ce qu'ils veulent et deviennent “contrôlants”. D'autres, à l'inverse, font à sa place ou démissionnent, l'abandonnant totalement. Rien ne marche, car aucune de ces deux attitudes n'aide à développer le sentiment d'être capable chez l'enfant.»

Les solutions? Redonner du sens au travail et à l'étude, en les dissociant notamment des seuls «résultats.» Charles Martin-Krumm et Ilona Boniwell, chercheurs en psychologie positive, dévoilent dans leur livre Pour des ados motivés (Ed. Odile Jacob) les nombreuses découvertes en psychologie positive aidant les parents à adopter l'attitude juste pour favoriser la motivation, la curiosité et la persévérance des jeunes.

Au premier plan, laisser tomber la politique de la carotte («si tu as une bonne note, je t'achète un nouvel iPhone»). Les recherches ont en effet montré que si un élève au départ plutôt motivé reçoit des récompenses pour réaliser l'activité, il aura peu à peu tendance à dissocier ces deux incitateurs du comportement et à considérer la raison externe comme plus prégnante que la raison interne. Autrement dit, il percevra progressivement qu'il n'est plus «à l'origine» de ses actes et que ce qui cause ou régule son comportement est à l'extérieur de lui-même. Résultat: l'enfant apprend seulement pour recevoir des bons points, et non plus pour satisfaire sa curiosité. Celle-ci risque alors de s'épuiser.

Autre facteur motivant: changer de regard sur les erreurs et les échecs de l'enfant. «Pour satisfaire le besoin d'autonomie d'un élève, on lui demandera de trouver lui-même des pistes de correction concernant ses ratages, explique Charles Martin-Krumm. Et on valorisera le processus d'apprentissage par essais/erreurs.» Car en permettant à l'enfant d'échouer on lui évite de se sentir mal face à l'échec, et l'on renforce ainsi en lui esprit d'initiative et envie de progresser.

  En parents: accompagner son enfant… sans l'envahir

Concernant les devoirs à la maison, des professionnels comme Béatrice Sabaté encouragent - de même que pour le sommeil, d'ailleurs - l'instauration d'un «rituel» de travail conçu en amont avec l'enfant: combien de temps consacrer aux devoirs? Avant ou après le goûter? À base de lecture/relecture ou rédaction de fiches? «Trop de parents focalisent sur les résultats et ne semblent pas s'intéresser au processus d'apprentissage et aux étapes qu'il suppose», observe cette ambassadrice d'une «pédagogie de l'encouragement». L'enjeu est donc à chaque fois de manifester son attention à ce que vit l'enfant, sa propre curiosité pour là où il en est et comment les connaissances qu'il acquiert l'aideront à mieux vivre dans le monde.

L'attention…telle semble être le sésame de la relation parents-enfants actuelle, et il n'est pas seulement limité au travail scolaire. «Les adultes pris dans la culpabilité de ne pas être disponibles - à cause de leur travail, ou d'une vie de famille recomposée… - ont du mal à maintenir les consignes, à établir un cadre précis aux jeunes, observe le Dr Alain Braconnier. Or, ils ne doivent jamais oublier que l'enfant a besoin d'une autorité qui le protège.»

Protéger l'enfant, c'est notamment anticiper: prévenir les dérives avant même d'avoir à punir. «C'est au moment même où on lui offre la console en 3D qu'on lui précise les horaires auxquels il pourra y jouer les jours d'école», note le pédopsychiatre. C'est aussi repérer le mal-être avant que les problèmes ne s'installent à l'école. Charles Martin-Krumm invite ainsi les parents à entendre certaines généralisations pessimistes des enfants comme les signaux d'une faible estime de soi («de toute façon, je suis nul!»). «On peut alors endiguer le processus en rappelant qu'une note à un contrôle n'est qu'une évaluation faite à un moment donné, ou faire référence à d'autres résultats, plus positifs, obtenus par ailleurs», écrit le chercheur. Et, bien sûr, on n'oubliera pas de célébrer les succès lorsqu'ils arrivent… mais sans survaloriser ceux-ci! «Si vous dites à votre enfant que vous êtes fier de lui seulement lorsqu'il a de bonnes notes, vous mettez en doute la fierté toute simple que vous pouvez retirer du simple fait d'avoir un fils (ou une fille) comme lui (ou elle)», avertit Charles MartinKrumm.

Cette forme d'attention n'est pas non plus «l'overprotection» dont font preuve certains parents baptisés «parents hélicoptères» aux États-Unis parce qu'ils ne «lâchent» pas leurs enfants d'une semelle et ainsi… leur font de l'ombre. Parfois, la juste attention inspire d'avoir recours à un tiers (pensionnat, étudiant pour les devoirs, psy…) et de renoncer à se croire tout-puissant envers son enfant.

Enfin, les parents pourront se rappeler qu'une bonne part de l'éducation se fait par imprégnation et imitation. En matière de transmission, ils tireront donc toujours de grands avantages à porter leur attention aussi sur… eux-mêmes et leurs propres comportements.

Source : Le figaro

Dislike
0