Aux Assises de Paris, des rescapés du génocide rwandais sont venus témoigner ce vendredi 3 juin au procès des deux bourgmestres rwandais. Octavien Ngenzi et Tito Barahira sont accusés de crimes contre l'humanité et génocide devant la Cour d'assises de Paris, pour avoir notamment participé au massacre de centaines de Tutsis dans l'église de leur village de l'est du Rwanda en avril 1994. Ce vendredi 3 juin, des rescapés ont fait le récit glaçant du massacre de l'église de Kabarondo. Compte rendu d'audience.
Eulade et Straton, tous deux la soixantaine, sont des agriculteurs de la commune de Kabarondo. Comme toutes les familles tutsies de la région, ils ont trouvé refuge à la paroisse du village. Et c’est d’ailleurs sur les conseils du bourgmestre, Octavien Ngenzi, qu’ils s’y sont rendus avec leurs proches.
Ce 13 avril 1994, ils sont donc des centaines à s’entasser dans l’édifice, mais « c’était un piège », souffle Straton aux jurés. Le bourgmestre leur demande d’aller rencontrer la population sur la place du marché voisine. Mais la population, ce sont en fait « les Interahamwe », précise le témoin. Les massacres commencent.
Marie Mukamunana témoigne à son tour. C’est une miraculée. Comme toutes les femmes, elle était restée avec les enfants dans l’église, bientôt cernée par des militaires qui tirent sans relâche, des heures durant. « Ils ont tué mes sept enfants, confie Marie Mukamunana. Ils ont fait de moi une handicapée. »
Des bourgmestres « ralliés » à la cause génocidaire
A n’en pas douter, le témoignage de l’abbé Nshimatata fut aussi un moment clé du procès des deux bourgmestres rwandais. Un témoignage qui était attendu par toutes les parties, et particulièrement redouté par la défense. Car l’abbé Nshimatata a tout vu et il connait le rôle des bourgmestres, « ralliés », a-t-il dit à la cause génocidaire, et qui ont laissé faire.
« Il est venu, dans un propos plein de réserve, lâcher la vérité qui est la sienne. Une vérité qui effectivement est à charge pour les deux accusés,commente Loïc Padonou, avocat des parties civiles au micro de RFI. Ce qu’on peut constater, qu’on a ressenti à l’audience, c’est qu’il y a une différence assez importante entre l’abbé et les autres témoins, c’est que l’abbé est lettré et est venu délivrer son message dans un français parfait, impeccable, qui a touché chacun de manière assez directe. »
Et d’autres témoins sont encore attendus à la barre dans les prochains jours. C’est d’ailleurs la première fois en France que des rescapés du génocide rwandais témoignent ainsi devant la justice.
Source : RFI