Le chef de l'ONU a déclaré lundi que dans le conflit actuel entre l'armée israélienne et les militants palestiniens à Gaza, où des milliers d'enfants ont été tués au cours des dernières semaines, le monde est témoin d'un niveau de violence sans précédent depuis qu'il est Secrétaire général.
En réponse à une question posée lors d'une conférence de presse sur le dernier rapport sur les émissions de gaz à effet de serre, le Secrétaire général António Guterres a souligné que dans tous les rapports publiés, pendant son mandat, sur les enfants dans les conflits, il était clair que la guerre actuelle à Gaza a vu des milliers de décès d'enfants - contre des centaines dans les conflits au Yémen et en Syrie.
Sans entrer dans le débat sur l’exactitude des chiffres publiés par le ministère de la Santé de Gaza, considérés comme fiables par les agences de l’ONU, il a affirmé que « ce qui est clair, c’est que nous avons eu en quelques semaines des milliers de morts d’enfants ».
Les derniers rapports des autorités sanitaires indiquent que plus de 13.000 civils au total sont morts dans l'enclave depuis les attaques du Hamas du 7 octobre et l'offensive israélienne qui a suivi.
« C’est ce qui compte. Nous assistons à un massacre de civils sans précédent dans aucun conflit depuis que je suis Secrétaire général », a dit M. Guterres.
Avancer vers une solution à deux Etats
Abordant également la manière dont la région pourra avancer une fois les combats terminés, le chef de l'ONU a déclaré qu'il était « important de pouvoir transformer cette tragédie en une opportunité ».
Il a déclaré qu'un cessez-le-feu humanitaire était une première étape cruciale, au même titre qu'un accès sans restriction à l'aide humanitaire, la libération des otages et la fin des violations du droit international humanitaire et la protection des civils.
Le chef de l'ONU a souligné que l'Autorité palestinienne, qui administre la Cisjordanie et qui a été chassée de Gaza en 2006 par le Hamas, ne pouvait clairement pas en prendre le contrôle tant que les chars israéliens restent, ce qui signifie qu'il doit y avoir une « période de transition ».
« Je ne pense pas qu'un protectorat de l'ONU à Gaza soit une solution. Je pense que nous avons besoin d'une approche multipartite dans laquelle différents pays, différentes entités coopéreront. Pour Israël, bien sûr, les États-Unis sont le principal garant de sa sécurité. Pour les Palestiniens, les pays voisins et arabes de la région sont essentiels », a déclaré M. Guterres.
« Tout le monde doit donc s'unir pour créer les conditions d'une transition, permettant à une Autorité palestinienne renforcée, d'assumer la responsabilité à Gaza et ensuite, sur cette base, d'avancer enfin... d'une manière déterminée et irréversible vers une solution à deux Etats basée sur les principes largement établis par la communauté internationale et que j'ai maintes fois soulignés », a-t-il ajouté
Une situation invivable
À Gaza, où deux écoles gérées par l'ONU ont été directement touchées au cours du week-end dans un contexte d'intensification des combats, le sort des civils continue de s'aggraver alors que de fortes pluies s'abattent sur l'enclave.
Un message de l'agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens, (UNRWA) sur la plateforme de médias sociaux X, a décrit lundi la situation dans les abris comme « invivable ». Il a indiqué que les Gazaouis n'avaient « pas d'options », faisant écho aux avertissements répétés des humanitaires de l'ONU : aucun endroit n'est sûr pour les civils à Gaza.
Depuis les attaques du Hamas contre Israël le 7 octobre, qui ont coûté la vie à environ 1.200 personnes et durant lesquelles près de 240 personnes ont été prises en otage, des centaines de milliers de Gazaouis ont fui vers le sud de l'enclave palestinienne, à la suite d'un ordre d'évacuation de l'armée israélienne.
Exode massif
Des images satellites de l'exode ont montré une masse de personnes se déplaçant à travers un paysage de bâtiments détruits, tandis que d’autres photographies prises sur le terrain montraient des familles transportant leurs biens à pied ou une femme traînant deux bébés dans des sièges auto derrière elle.
Dans une mise à jour dimanche, Tom White, Directeur des affaires de l'UNRWA à Gaza, a déclaré à la chaîne américaine ABC que 13 sites de l'UNRWA où des personnes s'étaient « réfugiées sous le drapeau de l'ONU » avaient été « directement touchés » depuis le 7 octobre, tandis que « d'innombrables autres abris » avaient subi des « dommages collatéraux » dont un grand nombre dans le sud de Gaza, où les civils avaient reçu l'ordre de fuir.
Des dizaines de personnes tuées dans des abris
M. White a déclaré que 73 personnes avaient été tuées dans les abris de l'UNRWA à ce jour, « dont une grande partie dans le sud » de l'enclave.
« La réalité est que les Gazaouis n'ont nulle part où aller pour se mettre en sécurité et qu'ils sont tous exposés à la menace des combats et en particulier des frappes aériennes », a dit le responsable de l'UNRWA.
Selon l'agence onusienne, plus de 880.000 personnes déplacées à l'intérieur du pays ont trouvé refuge dans 154 installations de l'UNRWA dans les cinq gouvernorats de Gaza. Sur les 2,3 millions d'habitants de Gaza, 1,7 million sont aujourd'hui déplacés.
À ce jour, 104 membres du personnel de l'UNRWA et au moins 11.000 personnes à Gaza ont été tués, selon les autorités sanitaires.
« Des maisons ont été touchées dans toute la bande de Gaza », a déclaré M. White, qui a précisé que la principale préoccupation des gens était : « S'ils sont dans le nord ou dans le sud, sont-ils en sécurité ? »
Risques d’épidémies
Le nombre important de blessés parmi les civils à Gaza et le début de crise sanitaire dans l’enclave constituent une « recette pour des épidémies », a déclaré lundi le Directeur des interventions d’urgence de l’Organisation mondiale de la santé.
Le Dr Mike Ryan de l'OMS s'exprimait devant des journalistes au siège de l'ONU. Il a ajouté que « de nombreux enfants » restent en danger, qu’il s’agisse d'otages ou de ceux qui vivent sous les bombardements sans aucun endroit sûr où s'abriter, alors que les combats entre militants palestiniens et forces israéliennes se poursuivent.
Jusqu’à 1.500 enfants restent portés disparus à Gaza – dont beaucoup sont probablement sous les décombres – a-t-il déclaré, alors que le système de santé est confronté à une « pression extrême ».
Il a indiqué qu'après l'évacuation de nombreux patients du plus grand hôpital, Al Shifa, au cours du weekend, le personnel de santé resté à l'hôpital indonésien dans le nord de Gaza pourrait également devoir être évacué dans les prochains jours.
L’ordre des forces israéliennes donné aux civils de se déplacer vers le sud de Gaza crée une concentration de personnes dans les centres et les écoles de l’UNRWA, ce qui « alimente les risques d’épidémies », a-t-il ajouté. A cela s'ajoutent les pluies froides récentes, ce qui entraînera une augmentation des pneumonies infantiles, a prévenu le Dr Ryan.
Des patients toujours à l'hôpital Al-Shifa
Rob Holden, responsable des urgences de l'OMS, lors d'un exposé depuis Rafah, dans le sud de Gaza, a donné plus de détails sur l'évacuation des 31 bébés prématurés de l'hôpital Al-Shifa.
Il a déclaré que l'opération en deux volets du weekend avait été un succès, les bébés et les membres restants de la famille ayant été évacués de la zone, en collaboration avec le Croissant-Rouge palestinien.
Il a indiqué que 28 d’entre eux avaient été envoyés de l’autre côté de la frontière pour être confiés aux soins du Croissant-Rouge égyptien et y être soignés lundi.
Parmi les 220 patients restant à Al Shifa, il a précisé qu'un certain nombre étaient « dans un état potentiellement mortel », avaient besoin d'une dialyse et qu'un homme restait en soins intensifs.
Il a ajouté que 25 patients souffraient de graves blessures à la colonne vertébrale et que l'OMS travaillerait avec le Croissant-Rouge palestinien pour les déplacer vers le sud de Gaza.
Source: ONU Info
https://news.un.org/fr/story/2023/11/1140787