Regard dans le vide, absence de réactivité… À l’approche de la journée internationale de l’épilepsie, focus sur l’épilepsie-absence.
Une perte de connaissance suivie d’une chute et de tremblements généralisés… Tout le monde croit pouvoir reconnaître une crise d’épilepsie. Mais ce type d’épilepsie, que l’on appelle tonicoclonique, n’est qu’une forme parmi tant d’autres. L’une d’elles, touchant principalement les enfants et les adolescents, se manifeste par des absences répétées: on parle d’épilepsie-absence. «C’est comme si le malade se mettait sur pause pendant quelques secondes, explique le Pr Stéphane Auvin, neuropédiatre à l’hôpital Robert Debré à Paris. On observe une rupture de contact associée à une fixité du regard avec un arrêt puis une reprise de l’activité en cours.»
Cette crise, consécutive à la modification brutale de l’activité électrique d’un amas de neurones dans une zone du cerveau, provoque une perte de conscience pendant 5 à 20 secondes. «Pendant une absence, les informations qui arrivent au cortex sont déstructurées et ne peuvent donc pas être conscientisées, précise le Pr Stéphane Charpier, professeur de neurosciences à la Sorbonne Université et directeur de recherche à l’Institut du Cerveau et de la Moëlle épinière (ICM) à Paris. L’individu se déconnecte puis se reconnecte sans s’en rendre compte, un peu comme si le temps s’arrêtait pendant un bref instant.»
L’épilepsie absence de l’enfant: 10% des épilepsies infantiles
Deux types d’épilepsies-absence sont particulièrement observés: celle qui touche les enfants et celles qui survient pendant l’adolescence. La première est la plus fréquente. Elle se manifeste par l’apparition du jour au lendemain d’une vingtaine à une centaine de crises quotidiennes. Ce qui ne passe pas inaperçu. «La situation la plus classique, c’est la maîtresse qui repère des arrêts brefs d’activités chez un de ses élèves», détaille le Pr Auvin.
Probablement d’origine génétique, cette maladie touche les enfants de 4 à 12 ans, avec un pic autour de 6-7 ans. Elle représente environ 10% des épilepsies infantiles. Sachant que l’épilepsie, toutes formes confondues, touche 1% de la population, l’épilepsie-absence de l’enfant reste donc rare.
Son diagnostic est réalisé par un neurologue à l’aide d’un électroencéphalogramme (EEG), un examen qui consiste à mesurer l’activité électrique du cerveau. Généralement, cette maladie se soigne bien grâce aux médicaments antiépileptiques qui permettent d’empêcher les crises chez 95% des patients. Toutefois, leurs effets secondaires non négligeables (prise de poids, troubles digestifs et cutanés principalement) nécessitent une adaptation au cas par cas afin de favoriser une bonne prise du traitement. Après deux ans sans crise, l’arrêt des médicaments peut être envisagé. Seul un patient sur dix récidivera au cours de sa vie.
En plus des traitements, «il est primordial de dépister un déficit de l’attention que l’on retrouve chez 30% des enfants atteints d’épilepsie-absence, ajoute le Pr Auvin. Une prise en charge adaptée de ce trouble associé est fondamentale afin que la scolarité puisse se dérouler correctement».
L’épilepsie absence de l’adolescent: une prise en charge plus complexe
Très proche de celle de l’enfant, l’épilepsie-absence de l’adolescent, est d’apparition plus tardive, entre 10 et 16 ans, avec un pic autour de 14 ans. Elle se distingue toutefois par des crises d’absence moins longues et moins fréquentes, pouvant facilement passer inaperçues, et surtout par la présence de crises de tremblements associées, inexistantes dans l’épilespie-absence de l’enfant. L’autre différence de taille est la nécessité d’un traitement au long cours du fait du risque important de récidive à l’arrêt des médicaments.
«Ces spécificités impliquent des répercussions importantes sur la qualité de vie, souligne le Pr Auvin. Lors de l’adolescence, période de transition, il est parfois compliqué d’instaurer une bonne observance du traitement antiépileptique. Une supervision de la part des parents, souvent nécessaire, n’est pas toujours bien accueillie par l’adolescent». Car même si le traitement permet de bien contrôler la maladie, un oubli de prise augmente considérablement le risque d’apparition d’une crise. Les conséquences non négligeables sur l’autonomie, les études ou encore l’obtention du permis de conduire nécessitent donc un suivi rigoureux par un neurologue.
«Il est également essentiel de briser les fausses croyances véhiculées sur ces pathologies», relève le Dr Cuvellier, comme celles circulant autour des jeux vidéo. Les épilepsies-absences ne s’accompagnant généralement pas d’une photosensibilité, les flashs lumineux ne risquent pas de déclencher de crises. De plus, la plupart des activités physiques et de la vie quotidienne peuvent être pratiquées sans problème lorsque la maladie est contrôlée. Seuls quelques sports extrêmes, comme l’alpinisme ou le parachutisme, sont contre-indiqués.
Source : Le Figaro