Le fardeau de la violence

mer, 12/18/2019 - 19:58 -- siteadmin

La maltraitance et la négligence des enfants (MNE) est un problème économique, social et de santé à l’échelle mondiale. La violence contre les enfants (VCE) constitue également un problème de santé publique, de droits de l’homme et de société, aux conséquences potentiellement dévastatrices et coûteuses. Ses effets destructeurs nuisent aux enfants dans tous les pays, affectant les familles, les communautés et les nations et touchant plusieurs générations. La VCE est inclue dans le cadre juridique des Nations Unies sur la violence faite aux enfants. Elle persiste dans les sociétés et les cultures-, malgré les structures spécifiques de détection et de protection. C’est un problème de santé publique tragique néanmoins évitable dans le monde.

Fléau croissant et réponse insuffisante

Dans les années 1990, on estimait que seuls 10 % des enfants qui risquent d’être maltraités bénéficiaient d’un soutien et d’une prise en charge appropriés en termes d’alerte et de dénonciation. Actuellement, selon les données de l’OMS, seul un nombre limité d’enfants exposés à la maltraitance bénéficie d’un suivi minutieux. Il convient de noter que les établissements pédagogiques, telles que les crèches et les écoles, ont de mauvaises structures médico-sociales pour prendre en charge la maltraitance des enfants. Par conséquent, elles ne semblent pas pouvoir jouer un rôle décisif dans la détection et le signalement de ces cas, les abus étant commis en majorité au sein et en dehors du cadre familial. Le pourcentage d’enfants exposés à la violence a également augmenté de manière spectaculaire avec la situation difficile des enfants réfugiés.

Avec la crise croissante des environnements dangereux pour de nombreux enfants dans le monde, les enfants migrants et déplacés sont exposés aux pires formes de maltraitance et de risques. Souvent tributaires du trafic humain, ils peuvent facilement être victimes de trafiquants et d’autres criminels. Nombre d’entre eux sont soumis aux pires formes de maltraitance et de privation durant leurs voyages. Au cours des dernières années, près de 50 millions d’enfants ont migré dans le monde, à travers les frontières ou ont été déplacés de force – et ceci est une estimation prudente. Plus de la moitié de ces filles et garçons ont fui la violence et l’insécurité, soit 28 millions au total. Ces enfants peuvent être des réfugiés, des déplacés à l’intérieur de leur propre pays ou des migrants, mais ils sont avant tout des enfants : peu importe d’où ils viennent, qui qu’ils soient et sans exception.

En toutes circonstances et par tous les moyens d’existence, les enfants malheureux sont la honte d’une humanité défaillante.

Les enfants dans les conflits armés sont tués, mutilés, kidnappés, déplacés, maltraités, négligés, persécutés, exploités, trafiqués, appauvris, séparés et forcés au travail.

Les enfants ne sont pas responsables des bombes et des balles, de la violence des gangs, de la persécution, des récoltes ratées et des bas salaires des familles qui les chassent. Cependant, ils sont toujours les premiers à être touchés par la guerre, les conflits, le changement climatique et la pauvreté.

Dans ces contextes, les enfants sont au nombre des personnes les plus vulnérables de la planète. Cette vulnérabilité ne fait que s’aggraver. Le nombre d’enfants réfugiés sous le mandat du Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a plus que doublé en l’espace de dix ans. Ces statistiques choquantes sont tout simplement inacceptables.

Selon une étude récente des Centres de contrôle et de prévention des maladies aux États-Unis (CDC) publiée dans Pediatrics, la majorité des décès sont évitables et plus de la moitié des enfants dans le monde – soit un milliard d’enfants âgés entre 2 et 17 ans – ont subi une forme de violence au cours de l’année écoulée.

Que devons-nous faire?

Conscients de la nature intrusive et injuste de la MNE et de la VCE, presque toutes les nations (196) ont ratifié la Convention des Nations Unies de 1989 relative aux droits de l’enfant, qui reconnaît le droit de vivre sans violence comme un droit fondamental des enfants. Aujourd’hui, plus de vingt-cinq ans plus tard, l’ONU a lancé un nouvel agenda pour le développement durable visant à mettre un terme à toutes les formes de violence faite aux enfants.

Plusieurs de ces Objectifs du développement durable 2030 sont pertinents pour ce qui est de l’objectif visant à mettre fin à la violence exercée contre les jeunes et les enfants. Les nouveaux partenariats devraient tirer parti de cette dynamique ainsi que de la prise de conscience croissante des effets toxiques de la violence sur le développement cérébral.

Le Partenariat mondial pour mettre fin à la violence exercée contre les enfants a un rôle crucial à jouer pour aider le monde à atteindre l’objectif mondial 16.2. Ce livre fait partie d’une telle stratégie. Il constitue aussi un outil de formation. La Société internationale pour la prévention des abus et de la négligence faite aux enfants (ISPCAN) a mis au point des modules et du matériel pédagogique pour soutenir sa mission visant à créer à travers le monde des systèmes durables de prévention, de protection et de traitement de la violence faite aux enfants.

Les professionnels des services sociaux, des forces de l’ordre et des tribunaux sont aussi les bienvenus et sont encouragés à participer à ce programme. Celui-ci est de nature médicale. Il mettra donc à la disposition de ces professionnels un large éventail d’informations et de compétences dont ils ont besoin pour leur rôle spécifique de protection des enfants. Il fournira également, sur base de ressources multiculturelles, une base de connaissances sur les problèmes médicaux et psycho-sociaux, afin que les professionnels de la santé (mais aussi d’autres secteurs concernés) puissent mieux comprendre comment aider au mieux les enfants.

Par Bernard Gerbaka - Professeur de pédiatrie à l’Université Saint-Joseph de Beyrouth, directeur du département de pédiatrie, président du pôle mère-enfant et membre du conseil de la faculté de médecine.

- Président du département de pédiatrie, directeur de l’unité de protection de l’enfant et coordinateur des urgences pédiatriques à l’hôpital universitaire Hôtel Dieu.

- Président de l’Institut libanais pour les droits de l’enfant.

 

Références

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Source : L’Orient Le Jour

https://www.lorientlejour.com/article/1198483/le-fardeau-de-la-violence.html