Plus de deux milliards de personnes dans le monde n’ont toujours pas accès à l’eau potable et à l’assainissement, alerte mardi l’ONU à l’occasion de la publication du dernier Rapport mondial des Nations Unies sur la mise en valeur des ressources en eau.
Avoir accès à l’eau potable et à l’assainissement est un droit de l’homme et un des Objectifs de développement durable (ODD). Malgré d’importants progrès enregistrés ces 15 dernières années, cet objectif reste hors d’atteinte pour une bonne partie de la population mondiale.
« L’accès à l’eau est un droit humain vital pour la dignité de chaque être humain. Pourtant, des milliards de personnes en sont toujours privées », a déploré Audrey Azoulay, la Directrice générale de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO).
En 2015, trois personnes sur dix (2,1 milliards) n’avaient pas accès à des services d’eau potable gérés en toute sécurité et 4,5 milliards de personnes, soit six sur dix, étaient privées d’installations sanitaires gérées de manière sûre. On est loin de l’objectif fixé par les Nations Unies : garantir l’accès de tous à l’eau et à l’assainissement et assurer une gestion durable des ressources en eau.
Le rapport de l’ONU analyse les ressorts de cette exclusion et explore les moyens de réduire les inégalités. Il montre également qu’il est possible de faire en sorte que le droit à l’eau potable et à l’assainissement devienne une réalité, « à condition qu'il existe une volonté collective d’aller de l’avant et que des efforts soient consentis pour inclure ceux qui sont 'laissés pour compte' dans les processus de décision », a souligné Mme Azoulay.
Une volonté qu’il faudra susciter sans perdre de temps. « Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Le rapport souligne que si la dégradation de l’environnement naturel et les pressions insoutenables sur les ressources mondiales en eau se poursuivent, 45 % du PIB mondial et 40% de la production céréalière mondiale seront en danger d’ici 2050 », a pour sa part déclaré Gilbert F. Houngbo, Président d’ONU-Eau et Président du Fonds international de développement agricole (FIDA).
« Les populations pauvres et marginalisées seront affectées de manière disproportionnée, ce qui aggravera encore les inégalités [...]. Le rapport 2019 met en évidence la nécessité d’adapter les approches tant en politique qu’en pratique, afin d’aborder les causes de l’exclusion et des inégalités », a-t-il ajouté.
Seulement un Africain sur quatre a accès à une source sûre d’eau potable
A l’échelle de la planète, c’est en Afrique que se trouvent la moitié des personnes qui boivent une eau provenant de sources non protégées.
En Afrique subsaharienne, seulement 24% de la population a accès à une source sûre d’eau potable et les installations sanitaires de base – non partagées avec d’autres foyers - sont réservées à 28% de la population.
Les inégalités d’accès en Afrique se traduisent également en inégalité des sexes. Ce sont essentiellement les femmes et les filles qui supportent l’essentiel de la charge liée à la collecte de l’eau, à laquelle elles consacrent plus de 30 minutes par jour au détriment de leur éducation.
Au sein même des pays, d’importantes différences existent, entre les riches et les pauvres notamment. En ville, les populations défavorisées vivant dans des habitations précaires qui ne sont pas reliées à l’eau courante paient souvent l’eau plus cher (10 à 20 fois plus que leurs voisins des quartiers riches) pour un service égal ou de moindre qualité assuré par des vendeurs d’eau ou des camions citernes.
Le droit à l’eau, insistent les auteurs du Rapport, ne peut être isolé des autres droits de l’homme. Les populations marginalisées et souffrant de discriminations du fait de leur genre, de leur âge, de leur statut social, de leur appartenance à une minorité religieuse, ethnique ou linguistique sont aussi les plus susceptibles d’avoir un moindre accès à l’eau et aux services d’assainissement.
Eau et conflits
L’accès à l’eau et aux installations sanitaires est un défi pour les réfugiés et personnes déplacées de force. Or, leur nombre n’a jamais été aussi élevé. En 2017, les conflits et les persécutions ont poussé 68,5 millions de personnes sur les routes.
A ce chiffre s’ajoute une moyenne de 25,3 millions de personnes forcées de migrer chaque année en raison de catastrophes naturelles, un chiffre qui a doublé depuis le début des années 1970 et qui est susceptible d’augmenter encore dans les années qui viennent sous l’effet du changement climatique.
Le rapport constate une hausse significative des conflits liés à l’eau. Entre 2000 et 2009, on en recensait 94. Entre 2010 et 2018, ce chiffre s’élevait à 263.
L’ONU souligne qu’il est rentable d’investir dans les infrastructures sanitaires et liées à l’eau. Le retour sur investissement est élevé, en particulier pour les plus vulnérables. L’effet multiplicateur pour chaque dollar investi est estimé à 2 pour l’eau potable et 5,5 pour l’assainissement.
Source : ONU
https://news.un.org/fr/story/2019/03/1039051