Zika : comment le virus bloque le développement du cerveau

mer, 12/13/2017 - 16:41 -- siteadmin

Une équipe de recherche internationale montre que le virus perturbe le développement du cortex après avoir réussi à franchir la barrière protectrice du cerveau.

L’épidémie de Zika déclarée en Amérique du Sud et dans les Caraïbes entre 2015 et 2016 a dévoilé le côté obscur de ce virus. Des milliers d’enfants infectés in utero ont développé une microcéphalie, une malformation irréversible liée à un nombre insuffisant de neurones. Dans Nature Neuroscience , une équipe de recherche internationale décrit pour la première fois le mécanisme responsable de cette anomalie. Ces travaux ont été menés par le Dr Laurent Nguyen de l’Université de Liège (Belgique) et le Professeur Marc Lecuit (Institut Pasteur).

Après avoir traversé la barrière hématoencéphalique, une membrane qui protège le cerveau, Zika infecte les cellules souches neuronales du cerveau des fœtus infectés. Ces cellules ne donnent alors plus naissance aux cellules progénitrices dîtes intermédiaires, dont le rôle est d’amplifier la production de neurones. «Ce phénomène, appelé neurogenèse indirecte, permet la formation du cortex cérébral et l’épaississement de celui-ci. En bloquant ce processus, le virus Zika induit la microcéphalie», explique au Figaro le Pr Marc Lecuit, coauteur de l’étude et responsable de l’unité de biologie des infections à l’Institut Pasteur.

L’étude de fœtus infectés a également permis aux chercheurs de découvrir que l’infection par Zika déclenche la mort précoce des neurones. Ce sont ces deux mécanismes qui expliquent le développement incomplet du cortex et sa taille réduite.

Mais il serait possible d’enrayer ce phénomène. Cette cascade d’événements serait liée à une voie de signalisation baptisée UPR, que les chercheurs ont réussi à désactiver chez des souris. «Les travaux préalables réalisés au sein de notre laboratoire ont montré que la voie UPR agit comme le chef d’orchestre de la neurogenèse», précise au Figaro le Dr Laurent Nguyen, coauteur de l’étude et chercheur en neurosciences à l’Université de Liège (Belgique). Au cours du développement normal du cerveau, les signaux UPR diminuent, ce qui permet aux différentes phases de la neurogenèse de se dérouler. Or l’infection par le virus Zika élève le niveau de l’UPR.

En empêchant l’activation de l’UPR, les chercheurs ont réussi à prévenir la microcéphalie chez des embryons de souris infectés à l’aide de molécules pharmacologiques. Un résultat intéressant pour essayer de trouver de nouvelles pistes de traitement.

Un mécanisme spécifique à Zika

Ce mécanisme semble être spécifique au virus Zika. En effet, le virus du Nil occidental ou le virus de la fièvre jaune - des flavivirus cousins du Zika - n’entraînent pas cette microcéphalie congénitale, bien qu’ils soient capables d’atteindre le cerveau.

Toutefois, il est possible que ces processus soient communs à d’autres virus responsables de microcéphalie comme la rubéole ou le CMV, un virus de la famille des Herpès. «Grâce à la vaccination, l’infection par la rubéole est très rare. Cette terrible malformation est donc très peu observée aujourd’hui. Mais en contrepartie, très peu d’équipes de recherche dans le monde travaillent sur ce virus et les mécanismes induisant la microcéphalie sont peu connus», relève le spécialiste des maladies infectieuses à l’hôpital Necker Enfants-Malades (AP-HP).

Les chercheurs de l’institut Pasteur et de l’université de Liège ont prévu de poursuivre leurs travaux et de comparer les différentes souches du virus Zika afin de déterminer si la souche actuellement en circulation est plus dangereuse pour les fœtus que les anciennes souches africaines ou asiatiques. Ils souhaitent également étudier d’autres virus.

Source : Le Figaro                                                                                                          

http://sante.lefigaro.fr/article/zika-comment-le-virus-bloque-le-developpement-du-cerveau/