Votre bébé dort mal ou très peu, et cela commence à peser sérieusement sur votre corps et votre cerveau. Deux spécialistes abordent les éventuelles causes.
Dans la grande aventure de la parentalité, il est un sujet crucial et redouté : le sommeil du bébé. En la matière, deux équipes se distinguent. Celle des parents dont l'enfant «fait ses nuits» (autrement dit, il dort au moins cinq ou six heures d'affilée), et puis l'autre, qui survit en espérant que sa progéniture daigne allonger son temps de sommeil nocturne... avant ses 2 ans. Il se trouve que vous jouez plutôt dans la seconde équipe. Votre enfant a dépassé les 6 mois, il chante encore la lambada plusieurs fois par nuit, et vous arrivez (presque) en bout de course.
Des réveils nocturnes normaux
Avant de rentrer dans le vif du sujet, tentez déjà de déculpabiliser, histoire de mieux supporter le reste. Oui, rien ne vous irrite plus que d'entendre un parent assurer que sa progéniture d'à peine 4 mois dort comme un loir, quand vous n'avez pas fait une nuit complète depuis la mise au monde de votre enfant. Mais le souci est très fréquent : «Environ 30% des tout-petits souffrent de troubles du sommeil. Quasiment un enfant sur deux est concerné durant ses six premières années», indique Céline Martinot , pédopsychiatre et médecin du sommeil, cofondatrice du premier Centre interdisciplinaire du sommeil à Paris.
Si les spécialistes s'accordent à dire qu'il est censé faire ses nuits entre quatre et six mois - à cet âge il n'a plus besoin de se réveiller la nuit pour manger - sachez que les réveils nocturnes des petits sont on ne peut plus normaux. «C'est physiologique. Ce qui est plus ennuyeux c'est quand ils ne gèrent pas les réveils. Ils sont censés se rendormir», souligne le médecin.
Les éventuelles causes
Sachez d'abord qu'«environ 15 % des réveils nocturnes des bébés sont dus à des causes médicales, intolérance au lait de vache, reflux, eczéma, otites...», rappelle la pédopsychiatre. Sans oublier que dès les premiers mois, on peut parler de petits ou de gros dormeurs. Si de multiples raisons peuvent expliquer la situation et qu'il n'y a aucune règle, certaines causes restent assez courantes.
Un mauvais rythme donné par les parents
La «rythmicité» peut aussi être mal gérée par l'enfant et les parents. À l'instar des adultes, le bébé a besoin de rituels du coucher. «Le sommeil est régulé par l'horloge biologique. Chez le petit, elle est immature et continue de se mettre en place. Pour qu'un bébé dorme bien, il est primordial d'être fidèle à un réel rythme, pour les repas, les heures de lever et de coucher», conseille la pédopsychiatre Céline Martinot.
Afin qu'il fasse la différence entre le jour et la nuit, «parlez-lui doucement durant la nuit et plus fort en journée. Ne laissez aucune lumière dans sa chambre le soir. Avant 2 ans, les enfants n'en ont pas besoin, la peur du noir ne se manifeste pas avant cet âge. Veillez aussi à ne pas diminuer la luminosité lors des siestes en journée», recommande Lyliane Nemet-Pier, psychologue clinicienne, psychanalyste et auteure reconnue dans le domaine de la petite enfance.
Les signaux du sommeil qu'envoie le bébé sont mal interprétés
«Souvent, les parents n'y sont pas sensibles. Quand on le voit bailler, se toucher une mèche de cheveux, se placer dans une certaine position, se frotter les yeux... il faut le coucher, le cycle de sommeil arrive», indique Lyliane Nemet-Pier. De la même manière, il faut comprendre qu'un bébé «s'endort dans un sommeil profond, période durant laquelle il est très agité. Sa respiration est haletante, il a des mouvements oculaires rapides, ses bras et ses jambes bougent... Les parents pensent souvent à tort qu'il est mal, alors qu'il dort profondément», ajoute la spécialiste. Inutile donc d'intervenir.
Il ne sait pas s'endormir seul
Selon les spécialistes, l'habitude de le laisser sombrer dans le sommeil comme un grand est à prendre dès tout petit. «Un bébé qui sait s'endormir seul gère mieux les réveils nocturnes, avertit le Dr Martinot. Le cas échéant, il se réveille avec la dernière image gardée, autrement dit celle du parent qui le berce ou qui le nourrit, et ne peut s'endormir que de cette façon.» «Il est important que l'enfant puisse avoir une sécurité qui le rend capable de rester longtemps allongé seul dans son lit. Un bébé qu'on ne peut pas laisser sur un tapis à regarder un mobile quelques instants ne pourra pas s'endormir seul», ajoute la psychologue Lyliane Nemet-Pier.
Les parents sont anxieux
Inutile de rappeler que les tout-petits épongent le ressenti des adultes. «Ils reçoivent tout ce que les parents vivent. Si le parent est une "machine à électricité", le bébé ne pourra pas se calmer», prévient la professionnelle. «Souvent, quand l'enfant se réveille et pleure, l'adulte arrive trop rapidement et ne laisse pas la chance au bébé de se rendormir. L'idéal est d'attendre un moment, d'y aller s'il ne se calme pas, de rester dans la pénombre, de ne pas le prendre et de lui parler. Ne surtout pas lui proposer de nourriture, sinon il ne pourra s'endormir qu'en mangeant», poursuit Céline Martinot.
Quelque chose ne lui convient pas
Enfin, les troubles du sommeil du bébé peuvent aussi traduire une gêne : «Il s'exprime avec son corps. En ne dormant pas, il peut donc montrer que quelque chose ne lui convient pas. Il faut alors tenter de comprendre, en consultant», commente Lyliane Nemet-Pier. Les raisons peuvent être multiples : sa place au sein de la famille, le moment auquel il est arrivé, s'il est un bébé surprise ou attendu depuis plusieurs années, si la grossesse a été difficile... Un petit doit dormir en journée par exemple, pour le bon développement de son cerveau. S'il ne le fait pas, cela peut résulter d'«un climat anxiogène à la maison, qui fait qu'il est en veille de quelque chose, en état d'alerte», poursuit la spécialiste.
Alors quelles sont les solutions ? Plusieurs astuces sont parfois utilisées par les parents pour faciliter le sommeil de l'enfant, à l'instar des infusions pour bébés. Mais lorsqu'on l'interroge sur la question, Lyliane Nemet-Pier est catégorique : «Tout ce qui rassure les parents ne résout pas le problème du sommeil». Une consultation peut alors être envisagée, peu importe l'âge de l'enfant. «Il faut le faire quand les parents ne supportent plus les réveils», conseille la psychologue. Vous avez l'impression que vous ne retrouverez jamais le repos de vos nuits sans enfant ? Le Dr Martinot rassure : «Tout s'arrange. Dans 90 % des cas, quand on règle ce problème, on a tout réglé !»
Source : Le Figaro