En France, le débat sur le «droit de correction» des parents a suscité de nombreuses polémiques. À l'occasion de la remise de son rapport lundi sur les droits de l'enfant en 2017, Jacques Toubon estime que la société française «a mûri» et lance un nouvel appel pour inscrire l'interdiction des châtiments corporels dans la loi.
Le débat sur l'interdiction de la fessée n'est pas clos. À l'occasion de la Journée internationale des droits de l'enfant, le Défenseur des droits, Jacques Toubon, appelle une nouvelle fois à inscrire la prohibition de tous les châtiments corporels dans la loi. Claque, fessée ou tape... Si les violences à l'égard des enfants sont déjà proscrites, et considérées comme des circonstances aggravantes, la justice reconnaît encore aux adultes un «droit de correction», s'il est «proportionné». Un sujet loin d'être consensuel en France où nombre de parents n'ont pas envie de se voir dicter leur conduite et jugent souvent «qu'une petite claque n'a jamais fait de mal à personne».
Le débat a «beaucoup mûri dans la société», estime le Défenseur des droits. «Il faut que la loi française dise que la fessée n'est pas un droit». «Cela fait au moins 20 ans que le sujet est sur la table en France, soupire-t-on dans les couloirs de l'institution. Alors que cette loi existe déjà dans une cinquantaine de pays».
Si le rapport 2017 sur les droits de l'enfant évoque «le poids symbolique» d'une telle évolution législative, Jacques Toubon, lui, va plus loin. «Cette mesure n'aura d'efficacité que si l'on met une sanction derrière, une sanction pénale. Si c'est une infraction, il faut la punir», préconise-t-il. Une position qu'il pourrait défendre dans la rencontre organisée lundi avec Emmanuel Macron, en compagnie de Geneviève Avenard, Défenseure des enfants. Le rapport souligne enfin la nécessité d'accompagner une telle mesure «d'actions pédagogiques pour sensibiliser le public à une éducation bienveillante et positive».
Censurée par le Conseil constitutionnel
Jusqu'à présent, les propositions de loi anti-fessée n'ont cependant jamais réussi à aboutir. La dernière tentative en date, un amendement glissé dans la loi Égalité et citoyenneté visant à compléter le Code civil, a finalement été censurée par le Conseil constitutionnel pour des raisons de forme en janvier 2017. La France, elle, a été condamnée par le Conseil de l'Europe et le comité des enfants de l'ONU qui lui reprochent de ne pas interdire clairement toute forme de châtiment corporel envers les enfants, y compris au sein de la famille.
Au-délà d'un appel à légiférer, le Défenseur des droits s'appuie également sur l'exemple d'une décision de justice pour montrer que le droit se montre aujourd'hui moins tolérant envers la violence éducative. Cette décision ne concerne pas des parents mais un représentant de l'autorité, en la personne d'une enseignante et directrice d'école maternelle. Cheveux tirés, brimades, humiliations, gifles, enfermement dans le «placard à sorcières»: cette dernière était accusée pour violences morales et physiques sur une dizaine de ses élèves de maternelle, âgés de 3 à 5 ans. Relaxée en première instance, elle a été condamnée en mai 2016 par la cour d'appel de Limoges à 12 mois de prison avec sursis et cinq ans d'interdiction d'exercer une activité professionnelle impliquant un contact avec des mineurs. En novembre, la cour de cassation - qui a dans l'ensemble suivi le jugement de la cour d'appel - a confirmé la condamnation d'un an de prison avec sursis pour l'enseignante. «Il y a aussi une évolution possible sur l'interdiction des châtiments corporels au travers de la jurisprudence», relève Jacques Toubon.
Source : Le Figaro