L’heure de l’été et des vacances est propice chez les adolescents aux expérimentations. La cigarette peut être l’une d’elle. Une manière, pour l’enfant, de s’imaginer devenir « adulte » et « autonome » selon Jean-Pierre Couteron, psychologue et président de Action Addiction, qui conseille aux parents de ne pas réagir « à chaud ».
La Croix :A quand remonte généralement la première cigarette et à quoi est-elle due ?
Jean-Pierre Couteron : Vers la fin des années collèges et le début des années lycées, une période à laquelle on commence à prendre son autonomie [selon le rapport Jeunes et addictions de l’OFDT, « dès 13 ans un quart des jeunes (24,5 %) en sont expérimentateurs et, à 15 ans, ils le sont pour plus de la moitié (51,8 %) »]. Il y a ce double mouvement « loin des parents, près des copains » et il faut se préparer à ce que son enfant expérimente certaines choses, comme la cigarette. La plupart du temps, la première est d’ailleurs fumée avec des camarades.
Quelles réactions adopter pour les parents qui le découvrent, notamment les fumeurs qui souhaitent rester crédibles ?
J-P C : On doit d’abord prendre en compte le passage à l’acte en lui-même, décidé sous l’influence d’autres personnes. L’expérience du tabac est au début liée à son image positive, associée au fait d’être adulte, « grand » et autonome. Il faut donc décrocher ces valeurs du tabac. Ensuite, il est important de dire la vérité sur l’escroquerie du produit, en parlant de la dépendance, de l’aspect chimique ou du cynisme de l’industrie.
Quand on est soi-même fumeur, c’est à ce moment qu’on peut faire partager sa propre expérience en disant qu’il ne faut pas reproduire la même erreur, qu’il est difficile d’en sortir ou en indiquant, qu’à son époque, il n’y avait pas toutes les informations dont on dispose aujourd’hui.
Les « recettes de grand-mère », comme obliger son enfant à fumer jusqu’à l’écœurement, ne sont pas une bonne idée. Il ne faut pas réagir à chaud mais simplement condamner le geste avec pédagogie.
Le paquet neutre, et les images agressives apposées dessus, ont-ils eu un effet sur les jeunes fumeurs ?
J-P C : Pas vraiment. Le but de cette mesure est d’arrêter de traiter la cigarette comme un produit de consommation courante et d’empêcher que le packaging soit attractif alors que le produit vendu est dangereux. Mais il ne faut pas être naïf, ça n’aura un effet que sur le long terme. Quand on est jeune, les images « trash » des paquets amusent plus qu’elles dissuadent.
L’arrivée de la cigarette électronique a-t-elle contribué à changer ces pratiques ?
J-P C : La cigarette électronique n’est pas une « porte d’entrée » vers la cigarette classique. Cela reste une démarche pour s’éloigner du tabagisme, qui concerne donc assez peu les plus jeunes. Il se peut que cela devienne une mode pour certains mais elle n’est pas, pour autant, devenue un objet banal. Il faut avoir conscience du risque de certains aspects attractifs de la cigarette électronique, comme avec les arômes qui sont incitatifs, pour mieux les encadrer. Faire preuve de prudence sans pour autant tout interdire.
Source : La Croix