Ouvert en janvier 2016 par l'ONG « Assameh Birth and Beyond » pour les familles défavorisées, le service réservé aux enfants a doublé ses effectifs en peu de temps. Il souhaite accueillir 1 200 nourrissons d'ici à 2020.
Vêtue d'une blouse grenat et d'un voile blanc, Fatmé Kalla déambule lentement entre les couveuses du service « néonatalogie » de l'aile pédiatrique de l'hôpital gouvernemental de la Quarantaine, ouverte par l'ONG « Assameh Birth and Beyond » en 2016 pour accueillir les nouveau-nés et les enfants de familles défavorisées.
Un silence de cathédrale accompagne la marche de la jeune infirmière. La salle n'accueille aujourd'hui que quatre pensionnaires, sur les huit places disponibles. « Il est très rare que l'on ait aussi peu de bébés », sourit-elle. Son attention est soudainement détournée par des gémissements provenant de l'autre extrémité de la salle.
Le corps gris jaune, les yeux bandés, plusieurs drains placés sur le corps, Lina souhaite visiblement mettre un terme à sa séance de photothérapie. Âgé de 7 jours, le nourrisson doit être exposé plusieurs heures par jour à la lumière pour soigner sa jaunisse. « Je n'ai jamais vu un tel cas en 16 ans de carrière », souligne Fatmé.
Lina fait partie des centaines de nouveau-nés et d'enfants soignés chaque année par le service pédiatrique de l'hôpital de la Quarantaine, destiné à accueillir les familles défavorisées. Un an et demi après son ouverture, la fréquentation de l'établissement a déjà pratiquement doublé. « Au début, nous accueillions en moyenne 30 pensionnaires par mois, précise Abboud Chami, bénévole d'"Assameh Birth and Beyond". Maintenant, ça tourne autour de 70 prises en charge mensuelles. » Ces chiffres rendent l'ONG ambitieuse : elle prévoit 900 patients pour 2017, contre 520 en 2016, et souhaite accueillir 1 200 familles d'ici à 2020.
Plusieurs facteurs expliquent cette attractivité. L'organisation assure la prise en charge des soins pour les familles qui ne bénéficient d'aucune couverture maladie. Rendu possible par les donateurs de l'ONG, ce remboursement lui permet de bénéficier d'une notoriété désormais nationale. « Avant, seuls des gens de Beyrouth et ses environs venaient chez nous, confie Youmna Zeidan, en charge de la communication. La nouvelle s'est vite répandue. Désormais, nos patients viennent de tout le pays. » Mais « Assameh Birth and Beyond » peut aussi compter sur la qualité de ses infrastructures. Elle dispose notamment de quatre lits de soins intensifs pédiatriques, très rares au Liban. « Il n'en existe que 30 dans tout le pays, indique Youmna Zeidan. Ce n'est pas négligeable. »
Une pénurie d'infirmières en pédiatrie
Les investissements ne sont pas seulement matériels. Les effectifs de l'aile pédiatrique ont été triplés depuis sa mise en service. Désormais, trois « néonatologues » et quinze infirmières travaillent au quotidien dans la structure. Ils sont épaulés par une dizaine de pédiatres volontaires, indépendants, qui interviennent de manière ponctuelle. Ces derniers ont tous des sous-spécialités : gastro-entérologie, neurologie, néphrologie, cardiologie, pneumologie, endocrinologie... Parallèlement, quatre chirurgiens pédiatriques font partie de l'équipe et pratiquent des opérations d'une grande délicatesse sur des prématurés et des nouveau-nés. « Il y en a beaucoup et ce sont souvent des cas très sévères », commente Youmna Zeidan.
Bénéfique pour le développement du service, cette augmentation des effectifs n'a cependant pas été de tout repos pour les dirigeants de l'ONG qui ont été confrontés à la pénurie d'infirmières en pédiatrie qui frappe le Liban – « il manque 10 000 postes dans le pays », déplore Robert Sacy, fondateur du service – mais aussi, et surtout, à la concurrence en matière de salaires imposée par les établissements du privé. Des partenariats avec l'université de Balamand et l'hôpital Saint-Georges ont ainsi été signés pour former plus d'infirmières en pédiatrie, tandis que 10 000 dollars supplémentaires sont déboursés chaque mois pour augmenter les salaires.
« L'argent est un facteur déterminant dans notre évolution », souligne Abboud Chami. L'homme se tient devant la porte de l'une des salles de pédiatrie. Une dizaine de couveuses et des équipements médicaux s'entremêlent, mais aucun nourrisson à l'horizon. « Tout est là, sauf les infirmières, fait-il remarquer. Nous n'en avons pas assez pour faire fonctionner cette pièce. »
« Assameh Birth and Beyond » organise de nombreux événements pour attirer de nouveaux donateurs. Le « Bal du cèdre » – un clin d'œil au célèbre Bal de la rose de Monaco – se tiendra notamment le 19 août prochain dans les jardins du palais de Beiteddine, pour une soirée d'exception. Et avec lui, l'espoir d'un nouvel agrandissement et du développement de l'aile pédiatrique.
Source : L’Orient Le Jour