À 3 ans, les enfants favorisent les figures d’autorité avant de développer, entre 5 et 8 ans, des tendances égalitaristes, selon une étude franco-suisse.
Après avoir mis en lumière la précocité des capacités cognitives, les recherches en neurosciences s’intéressent à la naissance de notre intelligence sociale. Une étude vient ainsi de montrer comment entre 3 et 8 ans, les enfants acquièrent le sens des relations hiérarchiques et deviennent sensibles aux inégalités. « Nous sommes des créatures sociales et même les bébés ont une compréhension du monde social. Il y a une véritable virtuosité dans leur capacité à comprendre ce monde », s’émerveille Jean-Baptiste Van Der Henst, chercheur à l’Institut des sciences cognitives de Lyon (CNRS, Université Lyon 1) qui a participé, avec des chercheurs suisses, à cette étude publiée dans la revue Developmental Psychology.
Dans une première expérience, 173 enfants ont regardé une saynète avec deux marionnettes dont l’une imposait ses jeux à l’autre. Les enfants devaient répartir entre elles un grand et un petit chocolat. Les chercheurs ont observé que les enfants reconnaissaient très tôt le chef et qu’à 3 et 4 ans, une large majorité lui donnait le grand chocolat. À 5 ans, ce favoritisme s’efface (répartition 50-50) avant de s’inverser à 8 ans. À cet âge, la quasi-totalité des enfants favorisent la marionnette subordonnée. « Les deux hypothèses étaient possibles mais j’avoue que j’ai été un peu surpris car cela n’apparaissait pas vraiment dans la littérature jusqu’à présent », remarque Jean-Baptiste Van Der Henst. Cette tendance a été confirmée par une expérience appelée « paradigme de Robin des Bois » au cours de laquelle les enfants modifiaient des ressources distribuées inégalement à trois personnages. Les plus jeunes ont continué à favoriser la marionnette dominante et les plus âgés la subordonnée, « parce qu’elle est moins chanceuse que l’autre ».
Plus petits, plus dépendants
Plusieurs facteurs expliquent ces comportements, selon les chercheurs. D’abord, les plus petits sont plus dépendants des figures d’autorité parentale ; à la crèche, les rapports de dominance entre enfants sont fréquents et enfin, ces très jeunes enfants peuvent vouloir s’attirer les faveurs du dominant ou éviter le conflit avec lui. Mais en grandissant, la vie sociale des enfants se complexifie, ils ont plus de partenaires de jeu : la notion d’égalité leur devient alors nécessaire pour évoluer dans leur groupe.
Cependant, ces résultats ne signifient pas que les enfants de 8 ans se montrent égalitaristes dans toutes les situations sociales. Les recherches se poursuivent en France, aux États-Unis et à Taïwan pour comprendre si le genre, la culture, le niveau socio-économique, le nombre d’enfants dans la fratrie, etc. ont une influence sur cette tendance.
Source : Le progres