Le 12 juin est marqué par la journée mondiale contre le travail des enfants. Cette année, elle met l'accent sur le travail des enfants dans les chaînes de production. 168 millions d'enfants sont encore employés contre leur gré dans le monde, principalement en Asie et en Afrique, surtout dans le secteur agricole. Mais alors que le nombre d'enfants au travail se réduit rapidement à l'échelle mondiale, la tendance à la baisse n'est pas aussi nette en Afrique subsaharienne.
En 2012, l'Organisation internationale du travail (OIT) estime qu'en Afrique subsaharienne, 59 millions d'enfants, soit plus d'un sur cinq, étaient employés contre leur gré. Une proportion deux fois supérieure au reste du monde. Parmi eux, près de 28 millions occupent un travail dangereux - extraction minière, exploitation sexuelle ou encore enfants-soldats. Cela représente un enfant sur dix, une proportion largement supérieure aux autres régions du monde.
Depuis le début des années 2000, de nombreux pays africains ont adopté des législations et ont souscrit à des programmes internationaux afin de lutter contre le travail des enfants. Mais la baisse du nombre et de la proportion d'enfants au travail reste bien moins rapide en Afrique subsaharienne que dans d'autres régions du monde, notamment en Asie, où le phénomène est en train de se résorber rapidement.
Scolarité gratuite et obligatoire, campagnes de sensibilisation, sanctions dissuasives, mais aussi un système de protection sociale assurant aux populations des conditions de vie décentes... Les mesures qui permettraient d'éliminer le travail des enfants sont connues, mais nécessitent une administration et une fiscalité efficaces. Ce dont ne disposent pas toujours les Etats d'Afrique subsaharienne.
Ainsi, la source du problème serait moins un manque de volonté politique que d’efficacité administrative. C’est ce que constate Laurence Dubois, responsable à l’OIT.
« Ratifier les conventions de l’OIT qui fixent le cadre de la lutte contre le travail des enfants, c’est un premier pas. Le deuxième pas, c’est de mettre la législation nationale en conformité avec ces différentes législations. Mais l’étape d’après, la plus importante, est de faire en sorte que cette législation soit appliquée, que les contrôles soient effectués et surtout qu’il y ait des sanctions par rapport aux personnes qui n’appliquent pas la législation », a-t-elle déclaré à RFI.
Laurence Dubois a également mis l’accent sur l’Inspection du travail qui, en Afrique aussi, connaît « des faiblesses » d’où l’importance de renforcer « l’administration du travail » ainsi que les « capacités » des inspecteurs du travail.
Elle évoque également plusieurs « actions directes » pour toucher directement les familles et les enfants concernés par le travail des enfants. Concernant les enfants qui peuvent être identifiés dans les chaines d’approvisionnement, elle préconise qu’on leur offre des solutions pour travailler soit « dans des conditions décentes » si ce sont des enfants qui ont l’âge de travailler soit, sinon, « être retirés de la chaine de production » et qu’on leur offre « les opportunités d’éducation ».
168 millions d’enfants dans le monde contraints de travailler
Les enfants sont actifs, encore aujourd’hui, dans les mines, dans les champs, dans le secteur touristique mais aussi dans les usines. Souvent en grande souffrance, ils sont exposés à des maladies, des blessures, voire même décèdent en produisant les biens qui alimentent pourtant l’économie mondiale.
L’Organisation mondiale du travail estime à 168 millions, le nombre d’enfants contraints de travailler dans le monde dont plus de la moitié cantonnés à des travaux dangereux. Aucune zone géographique n’échappe au phénomène. Si l’Asie pacifique enregistre le plus grand nombre d’enfants au travail, l’Afrique sub-saharienne se distingue en étant la région avec la plus forte incidence de travail.
L’agriculture continue d'être le secteur le plus concerné, en comptant 60% des enfants, suivi par les services et l’industrie. Le travail des enfants est surtout répandu dans une économie rurale ou informelle qui échappe à l’inspection du gouvernement et à la protection des syndicats. Ce phénomène est accentué par la pauvreté des familles dans ces zones mais est également dû à d’autres facteurs comme les normes sociales qui le tolèrent, le manque d’emplois pour les adultes ou encore la migration.
L'OIT a lancé la Journée mondiale contre le travail des enfants en 2002 pour attirer l'attention sur l'étendue mondiale du phénomène ainsi que les actions et les efforts nécessaires pour l'éliminer. Chaque année, le 12 juin, la journée rassemble gouvernements, employeurs, organisations du travail, la société civile, ainsi que des millions de personnes à travers le monde afin de mettre en évidence la situation des enfants qui travaillent et ce qui peut être fait pour les aider.
■ La lutte contre les filières de recrutement en Côte d'Ivoire
C’est bientôt les vacances scolaires. L’un des moments que choisissent les filières clandestines pour recruter des enfants souvent très jeunes pour les travaux exténuants dans les plantations de cacao en Côte d’Ivoire. Une situation totalement illégale.
Selon l’association Jekawili, qui abat un gros travail dans le domaine de la lutte contre le travail des enfants, ces filières usent d'un véritable stratagème pour faire entrer en toute illégalité en Côte d'Ivoire les enfants en provenance des pays limitrophes.
« Les recruteurs d’enfants qui travaillent dans les plantations profitent des vacances pour recruter des travailleurs, explique Martin Kouassi, chargé des programmes de l’association. Ils les mélangent aux enfants qui viennent en vacances, donc tous ces enfants sont considérés comme des vacanciers qui viennent en Côte d’Ivoire. A la frontière il y a des passages clandestins donc les enfants ne passent pas forcément aux postes-frontières. »
Ces dernières années, les autorités ivoiriennes se sont engagées à éliminer le fléau du travail des enfants. En prélude à la journée mondiale, N’Go Bakayoko, directeur de cabinet du ministre de l’Emploi et de la Protection sociale, a prévenu que « ceux qui continuent d’utiliser les enfants, malgré nos mises en garde, risquent de voir leur réputation ternie et leurs activités en pâtir ».
Entre 2012 et 2016, plus 4 000 enfants victimes ont été secourus, et plus de 3 000 personnes - policiers, gendarmes, journalistes, préfets, maires, etc. - ont été formées sur le sujet. Mais l’implication de tous est grandement souhaitée.
Source: RFI