À l'approche de la fin de l'année scolaire, certains parents n'hésitent pas à faire sécher les cours à leurs enfants pour raisons pratiques et/ou financières. Au grand dam de certains instituteurs et professeurs.
Marie a prévenu l'instituteur de son fils aîné de l'absence de ce dernier pour la semaine à venir en catastrophe. Soit le lundi pour le lundi. La raison invoquée : des jours à récupérer et un grand-père dévoué à qui rendre visite au bord de la mer. Seulement, la semaine en question ne correspondait pas aux vacances scolaires. Mi-pédagogue, mi-amusé, le maître a répondu à la mère tête en l'air en ces termes : «En tant qu'enseignant, j'ai le devoir de vous informer de l'importance de l'assiduité en classe, et ce jusqu'à la fin de l'année. Mais en tant qu'individu, je vous souhaite de bonnes vacances à la mer, et attends avec impatience le récit de cette belle aventure.»
Comme Marie, à l'approche des vacances, et qui plus est d'été, nombreux sont les parents à retirer leurs enfants des établissements scolaires avant l'heure. Comprendre, en dehors des clous fixés par le ministère de l'Éducation nationale selon un calendrier établi en fonction des aires géographiques (zones A, B, C). Si certains membres du corps enseignant se montrent compréhensifs, d'autres regrettent de voir leur salle de classe dépeuplée trop tôt. Quelles sont les conséquences de cet absentéisme imputé aux parents, et comment y remédier ?
"Les parents se relâchent sur l'assiduité"
La loi en la matière est claire : seule une maladie ou une réunion solennelle de famille peut perturber l'emploi du temps d'un enfant en âge d'être scolarisé (de 6 à 16 ans). En soi, rien ne prédispose les parents - et encore moins les enfants - à volontairement manquer les derniers jours de classe... Pourtant, à en croire Patrick Schuler, conseiller d'éducation du collège Notre-Dame-La Ferté-Bernard, dans la Sarthe, «un tiers des élèves manque à l'appel quelques jours avant la fin officielle des cours. Cette année, ajoute-t-il, l'école se termine le 7 juillet, mais certains élèves sont aux abonnés absents depuis le 25 juin !» Soit deux semaines avant l'échéance prévue par le calendier officiel...
À 500 kilomètres de là, dans l'école primaire de Villey-Saint-Étienne, un village de Meurthe-et-Moselle, le même constat est dressé. «Quelques parents se relâchent sur l'assiduité de leurs enfants en fin d'année», note Anne Mathieu, institutrice en charge de l'unique classe de CP. Et les raisons sont multiples : épuisement des enfants, coût de la nounou ou du centre de loisirs pour faire la jonction, prix des locations de vacances, grands-parents désireux de passer du temps avec leurs petits-enfants... Dans certaines familles, le calcul est vite fait ! «Je peux comprendre que les parents doivent prendre leurs dispositions. Il est vrai que certains obtiennent leurs vacances début juillet...», analyse Anne Mathieu.
"Réaménager les cours"
Et si ces absences se répètent ? Les enseignants ont «peu de pouvoir pour lutter», indique l'institutrice. «Un simple courrier explicatif suffit à justifier toute absence au niveau administratif. Les parents font ce qu'ils veulent. Et nous ne pouvons pas, en tant qu'instituteur, mesurer la crédibilité d'une raison personnelle...», détaille encore la professionnelle. Reste toujours la possibilité d'en référer au directeur ou proviseur de l'établissement scolaire. Mais il en coûtera quoi ? Un rappel à l'ordre, tout au plus ?
Pourtant, ces chaises vides avant l'heure ne seraient pas indolores, voire entraîner des impacts sur l'organisation et la vie de classe. «Être obligé de réaménager les cours, ce n'est pas satisfaisant», déplore Patrick Schuler. Sans compter qu'à cette période de l'année, des professeurs de collèges sont réquisitionnés pour corriger les copies du brevet et qu'un réaménagement est donc déjà nécessaire. «L'éducation commence à l'école. Si les contraintes calendaires sont déjà surpassées, c'est négliger les exigences qu'offrira la vie active quelques années plus tard», craint l'intitutrice lorraine. Patrick Schuler, nostalgique, ajoute : «C'est frustrant d'être professeur et de devoir dire au revoir à une classe composée de la moitié de ses élèves». D'autres au contraire, estiment qu'avec moins d'enfants, s'offre la possibilité de davantage profiter des présents.
Et d'un point de vue pédagogique ? Anne Mathieu tient à rappeler que ces absences estivales «n'ont pas de conséquence sur l'apprentissage de l'enfant». En revanche, «cela pose problème pour les enfants en difficultés lorsque cette semaine d'absence est prise en hiver».
Changer le calendrier
Pourrait-on, pour pallier ces absences aux abords des vacances, envisager une modification du calendrier scolaire pour contenter parents et enseignants ? C'est en tout cas l'une des options prônées par Patrick Schuler. «Terminer les cours fin juin, et reprendre fin août semble être la meilleure solution, conclut le conseiller d'éducation. L'année prochaine, si le ministère ne prend pas en compte ce problème, alors il va falloir anticiper davantage et organiser des ateliers stimulants sur la base du volontariat pour leur donner envie de rester jusqu'au bout.»
Source : Le Figaro