Le Parlement a donné son feu vert définitif, ce jeudi, à un texte qui vise à réduire les violences faites aux plus jeunes alors que 85 % des parents français ont recours à des pratiques relevant d'une violence éducative ordinaire.
Le jeudi 22 décembre a été voté de manière définitive l'article 68 du projet de loi «Égalité et Citoyenneté» qui précise désormais que l'exercice de l'autorité parentale exclut «tout traitement cruel, dégradant ou humiliant, y compris tout recours aux violences corporelles.» Ce texte a pour but de «contribuer à apaiser la société française, à donner sa juste place à la jeunesse, à lutter contre la délinquance et le terrorisme, et à donner tout leur sens aux termes égalité et fraternité de la devise républicaine».
Dans les pays qui ont voté une telle loi et mené des campagnes d'information à l'appui, on constate une baisse de la délinquance, des suicides, de la consommation d'alcool et de drogue, de la violence faite aux femmes, des placements en foyer, des agressions. En Suède, le taux de maltraitance a diminué progressivement depuis l'interdiction des châtiments corporels en 1979 jusqu'à devenir quasi-nul. Deux générations après, 87 % des Suédois n'ont jamais été frappés, et la quasi-totalité des parents n'envisagent même plus les châtiments corporels comme une méthode d'éducation possible. Depuis le vote de la loi en Suède, 50 autres pays dans le monde, dont 21 sur les 28 que compte l'Union Européenne, lui ont emboîté le pas.
● Châtiments corporels: qu'est-ce qui change vraiment avec la loi?
La violence éducative ordinaire (VEO) se retrouve sous plusieurs aspects dans l'éducation des enfants: elle englobe aussi bien les violences verbales et psychologiques (crier, injurier, se moquer, humilier, culpabiliser) que les violences physiques (gifler, fesser, tirer les oreilles ou les cheveux, donner des coups de pied, secouer ou bien encore priver un enfant de nourriture…).
Mais pas question de traîner devant la justice - du moins pour l'instant - les parents français qui pratiquent la violence éducative ordinaire: la loi qui vient d'être votée est une interdiction symbolique, pour favoriser une prise de conscience et changer l'attitude des adultes envers les enfants.
En tant que règle exclusivement civile, elle ne s'accompagne d'aucune sanction pénale. La loi vise surtout à favoriser l'accompagnement de campagnes d'information et de sensibilisation et de mesures d'aide et de soutien aux parents afin d'abolir toute forme de violence envers les enfants.
● Des conséquences parfois dramatiques
Des chercheurs de l'université d'Austin au Texas ont réalisé une analyse qui vient de paraître regroupant les données de 75 études, réalisées sur une période de 50 ans, portant sur 13 pays et 160.000 enfants. Cette étude révèle que les punitions corporelles favorisent les troubles du comportement. Par exemple, la fessée ne garantirait en rien aux parents une meilleure discipline, que ce soit à court terme ou à long terme. Au contraire, ils deviendraient même plus agressifs. «La société pense que la fessée et les châtiments corporels sont très différents, or nos recherches montrent que la fessée entraîne les mêmes résultats sur les enfants mais à un degré moindre.»
Si les conséquences physiques des punitions corporelles sont visibles à court terme (douleurs, voire ecchymoses, fractures, traumatismes, lésions…), certaines, résultant de la VEO sous toutes ses formes, passent souvent inaperçues (maux de ventre, de tête, agressivité accrue, repli sur soi…). D'autres conséquences moins connues se déclarent le plus souvent à moyen et long terme: ralentissement du développement cognitif, accroissement de l'agressivité, effets nocifs sur l'état de santé (perte de mémoire, affaiblissement du système immunitaire, hypertension, ulcères, problèmes de peau, prise de poids, troubles digestifs), suicides (dès l'adolescence voire plus tôt encore).
À l'âge adulte, on constate un accroissement des risques de cancer, troubles cardiaques, asthme, comportements agressifs, troubles mentaux, dépression et problèmes sexuels. Les études de ces dernières années ont même révélé un impact sur notre descendance à travers la modification de l'expression des gènes (épigénétique), heureusement, celle-ci est réversible.
Source: lefigaro.fr