Le monde a failli à son devoir de protection envers les enfants pris dans des conflits en 2018 (UNICEF)

mar, 01/01/2019 - 16:28 -- siteadmin

Des millions d’enfants vivant dans des pays touchés par des conflits armés voient leur avenir menacé alors que les belligérants continuent de bafouer leurs droits et que les dirigeants du monde échouent à leur demander des comptes, a déclaré l’UNICEF vendredi.

« Les enfants qui vivent dans des zones touchées par des conflits à travers le monde ont continué à subir des violences d’une ampleur inouïe au cours des 12 derniers mois et le monde les a une fois de plus abandonnés », déplore Manuel Fontaine, Directeur des programmes d’urgence du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF). « Depuis trop longtemps, les parties aux conflits commettent des atrocités dans une impunité presque totale, et la situation est loin de s’améliorer. Bien plus d’efforts peuvent et doivent être déployés pour protéger les enfants et leur venir en aide. »

En temps de guerre, les enfants sont directement pris pour cible, sont utilisés en tant que boucliers humains, sont tués, mutilés ou recrutés pour les combats. De la Syrie au Yémen, de la République démocratique du Congo au Nigéria, en passant par le Soudan du Sud et le Myanmar, les viols, les mariages forcés et les enlèvements sont devenus des armes de guerre à part entière.

« L’année 2019 marque le 30e anniversaire de la Convention relative aux droits de l’enfant et le 70e anniversaire des Conventions de Genève. Pourtant, au cours des trois dernières décennies, il n’y a jamais eu autant de pays impliqués dans des conflits internes ou internationaux. Les enfants qui vivent dans des régions en conflit font partie de ceux qui ont le moins de chances de voir leurs droits respectés. Il faut arrêter de prendre les enfants pour cible », déclare Manuel Fontaine. 

L’UNICEF appelle toutes les parties belligérantes à respecter leurs obligations en vertu du droit international et à cesser immédiatement de porter atteinte aux droits de l’enfant et de cibler des infrastructures civiles, notamment les établissements scolaires, les hôpitaux et les infrastructures d’approvisionnement en eau. L’UNICEF appelle également tous les États susceptibles de faire pression sur les parties au conflit à exercer cette influence pour protéger les enfants.

L’agence onusienne travaille avec ses partenaires dans tous ces pays afin de fournir des services de santé, de nutrition, d’éducation et de protection aux enfants les plus vulnérables. En octobre, par exemple, l’UNICEF a participé à la libération de 833 enfants recrutés par des forces armées dans le nord-est du Nigéria et travaille actuellement avec ces enfants afin de les aider à réintégrer leur communauté. Depuis le début du conflit au Soudan du Sud il y a cinq ans, l’UNICEF a permis à près de 6.000 enfants non accompagnés et séparés de retrouver leur famille. Au Bangladesh, en 2018, l’agence onusienne est venue en aide à des milliers d’enfants rohingyas réfugiés en leur fournissant un soutien psychiatrique et psychosocial. En Iraq, l’UNICEF travaille avec ses partenaires pour fournir des services spécialisés aux femmes et aux enfants victimes de violences liées au genre.

Les pays en conflit où les enfants ont le plus souffert en 2018

En Afghanistan, la violence continue de faire partie du quotidien. Près de 5.000 enfants ont été tués ou mutilés au cours des trois premiers trimestres de l’année 2018, le même nombre de victimes que pour toute l’année 2017. Dans ce pays, les enfants représentent 87% des victimes civiles des restes explosifs de guerre.
 

Au Cameroun, le conflit s’est aggravé dans les régions du nord-ouest et du sud-ouest, et les écoles, les élèves et leurs enseignants sont régulièrement pris pour cible. En novembre, plus de 80 personnes, dont de nombreux enfants, ont été enlevées dans une école située à Nkwen, dans le nord-ouest du pays, avant d’être relâchées quelques jours plus tard. À ce jour, 93 villages auraient été partiellement ou totalement incendiés en raison du conflit qui sévit dans ces régions, et de nombreux enfants ont été exposés à des actes d’une extrême violence.
 

En République centrafricaine, une recrudescence dramatique des combats a frappé la majeure partie du pays et deux enfants sur trois ont besoin d’une aide humanitaire.
 

En République démocratique du Congo, les violences interethniques et les affrontements entre les forces de sécurité et les groupes armés ou les milices dans la région du Grand Kasaï ainsi que dans les provinces de la Tanganyika, du Sud-Kivu, du Nord-Kivu et de l’Ituri, dans l’est du pays, ont eu des répercussions dévastatrices sur les enfants. Les violences et l’instabilité ont gravement sapé les efforts déployés pour enrayer l’épidémie du virus Ebola qui sévit actuellement dans l’est du pays. Par ailleurs, 4,2 millions d’enfants sont à risque de souffrir de malnutrition aiguë sévère, selon les estimations. La situation est d’autant plus grave que les enfants voient leurs droits bafoués, notamment avec les recrutements forcés par des groupes armés ou les violences sexuelles.
 

En Iraq, en dépit d’une nette accalmie des combats, quatre enfants ont été tués en novembre dans le nord du pays lorsque le camion qui les emmenait à l’école a été attaqué. Les familles et les enfants qui rentrent chez eux dans des régions qui ont été gravement éprouvées par les violences sont toujours exposés au danger des engins non explosés. Des milliers de familles restent déplacées et doivent actuellement faire face aux températures hivernales et aux inondations soudaines.
 

Dans le bassin du lac Tchad, le conflit en cours, les déplacements et les attaques ciblant les écoles, les enseignants et d’autres infrastructures éducatives menacent l’éducation de 3,5 millions d’enfants. Actuellement, dans la région qui englobe le nord-est du Nigéria, la région du lac Tchad, l’extrême nord du Cameroun et la région de Diffa au Niger, au moins 1.041 écoles sont fermées ou ne fonctionnent pas en raison de la violence, de la peur des attaques ou de l’instabilité, perturbant l’éducation de près de 445.000 enfants.
 

Une flambée récente de la violence dans la région frontalière entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger a entraîné la fermeture de 1.478 écoles.

Au Myanmar, l’ONU continue de recevoir des informations indiquant que le droit des Rohingyas à rester dans l’État de Rakhine, dans le nord du pays, est toujours bafoué. Ces informations font notamment état de tueries, de disparitions et d’arrestations arbitraires. Le droit des Rohingyas à circuler librement est largement restreint et ils ne peuvent accéder aux services de santé et à l’éducation, y compris dans le centre de l’État de Rakhine. Il est impératif de garantir que les enfants ont accès à une éducation de qualité et à d’autres services essentiels pour éviter une « génération perdue » d’enfants rohingyas privés des compétences nécessaires pour contribuer au développement de leur société.
 

Dans le nord-est du Nigéria, des groupes armés, notamment des factions de Boko Haram, continuent de s’en prendre aux filles, qui sont violées, victimes de mariages forcés avec les combattants ou utilisées en tant que « bombes humaines ». En février, le groupe a enlevé 110 filles et un garçon dans un établissement d’enseignement technique à Dapchi, dans l’État de Yobe. La plupart des enfants ont été libérés depuis, mais cinq filles sont mortes et une autre est toujours retenue en esclavage.
 

En Palestine, plus de 50 enfants ont été tués et des centaines de plus blessés cette année, généralement lors de manifestations contre la détérioration des conditions de vie à Gaza. Les enfants de Palestine et d’Israël sont exposés à la peur, au traumatisme et aux blessures.
 

Au Soudan du Sud, 6,1 millions de personnes souffrent d’une faim extrême à cause des conflits et de l’insécurité qui ont touché le pays tout au long de la saison annuelle de soudure. Même avec l’arrivée de la saison des pluies, plus de 43% de la population continue de vivre dans l’insécurité alimentaire. Si la promesse d’un nouvel accord de paix offre une lueur d’espoir aux enfants, les rapports faisant état de violences extrêmes à l’encontre des femmes et des enfants continuent d’affluer, notamment à Bentiu, où plus de 150 femmes et filles auraient récemment été victimes de terribles agressions sexuelles.  
 

En Somalie, plus de 1.800 enfants ont été recrutés par des parties au conflit durant les neuf premiers mois de l’année et 1.278 enfants ont été enlevés.  
 

En Syrie, entre les mois de janvier et de septembre, l’ONU a confirmé l’assassinat de 870 enfants – c’est le nombre d’assassinats le plus élevé jamais enregistré en cette période de l’année depuis le début du conflit en 2011. Les attaques se sont poursuivies jusqu’à la fin de l’année, tuant 30 enfants dans le village d’Al Shafa, situé dans l’est du pays, en novembre.

Dans l’est de l’Ukraine, le confit qui fait rage depuis plus de quatre ans a eu des effets dévastateurs sur le système éducatif, détruisant et endommageant des centaines d’écoles et forçant 700.000 enfants à apprendre dans des environnements précaires, au milieu de la violence des combats et des dangers posés par les engins de guerre non explosés. La situation est particulièrement grave pour les 400.000 enfants qui vivent à moins de 20 km de la « ligne de contact », qui marque la séparation entre les régions contrôlées par le gouvernement et les autres. Les tirs d’artillerie et les niveaux extrêmement élevés de contamination par les mines constituent une menace mortelle pour les enfants qui vivent à proximité de cette ligne.
 

Et au Yémen, l’ONU a confirmé que 1.427 enfants avaient été tués ou mutilés dans des attaques, notamment dans une attaque « inadmissible » visant un bus scolaire à Saada. Les écoles et les hôpitaux sont fréquemment pris pour cible ou sont utilisés à des fins militaires, privant les enfants de leur droit à l’éducation et à des soins de santé. Cette situation alimente la situation de crise déjà présente dans ce pays où un enfant meurt d’une maladie évitable toutes les 10 minutes et où la malnutrition aiguë sévère touche 400.000 enfants.

Source : ONU

https://news.un.org/fr/story/2018/12/1032671