C'est la mesure phare qu'Emmanuel Macron va annoncer mardi à l'occasion de la tenue, à Paris, des Assises de l'école maternelle. Aujourd'hui, l'école n'est obligatoire qu'à partir de 6 ans.
En ouverture des Assises de la maternelle, mardi matin à Paris, le président de la République va annoncer la scolarisation obligatoire des enfants dès l'âge de 3 ans, au lieu de 6 ans aujourd'hui. Une annonce qui n'est pas uniquement symbolique, car la proportion d'enfants scolarisés en maternelle, quoique très forte, a tendance à baisser depuis 2000. Si presque 100 % des enfants de 5 ans fréquentent l'école maternelle, seuls 97 % des enfants de 3 ans et 99 % de ceux qui sont âgés de 4 ans y sont inscrits. Cela signifie que de 20.000 à 30.000 enfants ne sont pas scolarisés chaque année, notamment parce que les parents qui ne travaillent pas préfèrent parfois les garder à la maison. «Certaines familles ont du mal à se séparer de leurs enfants jeunes. C'est culturel. Notamment dans les familles africaines, par exemple», explique Francette Popineau, du syndicat d'enseignants Snuipp-FSU. Mais, pour elle, «c'est ennuyeux, surtout pour les enfants dont les familles sont éloignées de la culture scolaire».
Une meilleure intégration
On sait par exemple que la fréquentation de l'école maternelle dès le plus jeune âge favorise statistiquement une plus grande réussite au CP. Pour Alain Bentolila, linguiste participant aux Assises, cette proposition serait «importante» car la maternelle est «au front des inégalités sociales». Si on souhaite «que le sort des enfants ne soit pas scellé à 6 ans, il faut remettre la maternelle au cœur de l'Éducation nationale. On obtiendra plus d'égalité en mettant les enfants le plus tôt possible à l'école». Une scolarisation obligatoire dès 3 ans pose cependant la question des conditions dans lesquelles ces enfants pourraient être accueillis. Aujourd'hui, de nombreux enfants de 3 ans ne sont par exemple scolarisés que le matin et rentrent chez eux pour déjeuner et faire une sieste, gardés par une nourrice ou leurs parents, pour des questions de confort. Cela sera-t-il encore possible en cas d'obligation de scolarité, laquelle impose une régularité dans la fréquentation de l'école?
Tout comme Jean-Michel Blanquer, le ministre de l'Éducation nationale, le linguiste n'est en revanche pas favorable à la scolarisation des moins de 3 ans en maternelle, qui était un des axes de la politique éducative de François Hollande, notamment en zone d'éducation prioritaire: «Il s'agit d'une idée très contestable. Une classe de 25 à 30 élèves pour des élèves à peine propres, voire pas propres, n'est pas adaptée», estime-t-il.
Dans son discours, Emmanuel Macron devrait très fortement insister sur l'importance de l'apprentissage du vocabulaire, lequel doit être au cœur des apprentissages, tout au long de la maternelle. «La question, ce n'est pas le préapprentissage de la lecture mais bien celle du vocabulaire alors qu'un nombre important d'enfants arrive aux portes de l'école primaire avec un langage incompatible avec une entrée réussie dans le monde de l'écrit», insiste le linguiste Alain Bentolila. Or c'est «le degré de maîtrise du langage oral qui conditionne une entrée réussie dans l'écrit», insiste-t-il. Sera aussi rappelé le fait que la formation initiale et continue des enseignants de maternelle mérite une plus grande attention. Le ministère s'interrogerait sur l'opportunité de spécialiser davantage les enseignants, qui peuvent aujourd'hui indifféremment enseigner en maternelle ou en primaire: «On ne s'occupe pas de la même façon d'un enfant de 3 ans et d'un enfant de 11 ans. Or ils ont la même formation», observe-t-on. Une attention toute particulière sera enfin portée aux agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (Atsem), ces agents recrutés à un niveau CAP qui secondent les enseignants de maternelle dans les classes. Leur rôle d'auxiliaire pédagogique devrait être davantage reconnu et valorisé. «Elles ne sont pas là uniquement pour changer les enfants, les emmener aux toilettes et à la cantine», affirme-t-on, précisant qu'elles pourraient, elles aussi, bénéficier de formations spécifiques.
Source : Le Figaro