Vous parlez une autre langue en plus du français ? Vous êtes en couple avec un étranger qui souhaite inculquer à vos enfants sa langue maternelle ? Ou votre famille s'est expatriée à l'autre bout du monde et vous souhaitez que les enfants continuent à parler français ? Ranka Bijeljac-Babić, psycholinguiste et auteure du livre L'Enfant bilingue (paru en janvier 2017 aux Éditions Odile Jacob), délivre ses précieux conseils pour bien transmettre votre langue maternelle à vos enfants.
Commencer dès la naissance
La spécialiste est formelle : parlez dans la langue que vous souhaitez apprendre à votre enfant dès la naissance et même avant. Si l'envie vous vient naturellement, alors foncez : «C'est durant ses premières années qu'il sera le plus réceptif. Ses capacités naturelles seront optimales. C'est comme respirer», conseille-t-elle.
Parler normalement
«Je vou-drais que tu vien-nes pren-dre ton bain», rien ne sert de parler de manière hachée.... Des études sur la parole adressée à l'enfant ont montré que spontanément les adultes parlent plus lentement aux enfants, en coupant un peu les mots. Mais heureusement, cela change au fur et à mesure que l'enfant grandit. «Ce qui est très étonnant c'est que nos progénitures ont une certaine idée de la grammaire universelle. La langue se construit même si on leur parle avec des phrases pas forcément correctes», précise la psycholinguiste. Les parents peuvent aussi proposer de lire, d'écouter des chansons et de regarder des films en version originale.
Faire preuve de tolérance
Vous voulez tellement que votre descendance parle parfaitement que vous soulignez la moindre faute. Erreur en votre défaveur. «Certaines études affirment que tout le temps corriger n'est pas productif pour l'enfant, qui peut perdre confiance en lui. Il pourrait même faire un blocage. Les parents ne doivent pas devenir enseignants à mon sens», affirme-t-elle. D'ailleurs, les chercheurs se sont rendu compte que les enfants en bas âge ne se corrigent pas entre eux, privilégiant la communication.
Ne pas négliger l'écrit
Parler c'est bien, écrire c'est mieux, en tout cas tout aussi important. Si l'enfant sait déjà écrire dans la langue nationale par exemple, cela va faciliter les choses. Mais si certains apprennent à écrire dans deux langues différentes en même temps, sans que cela ne pose de problème, d'autres peuvent rencontrer quelques difficultés. «Il ne sera peut-être pas aussi bon dans les deux idiomes mais ce n’est jamais très grave !», rassure l'auteure.
Continuer sur le long terme
Les enfants ont des capacités phénoménales pour apprendre rapidement. Malheureusement, c'est aussi le cas dans le sens inverse : «On peut tout perdre si on ne pratique pas régulièrement. Même un adulte peut diminuer sa fluidité, son vocabulaire. C’est souvent le cas pour les immigrés», met en garde Ranka Bijeljac-Babić.
Ne pas se décourager
Si vos rejetons se montrent réfractaires à votre langue chérie, pas de panique. Continuez à leur parler et, surtout, ne les brusquez pas. Cela produirait l'effet inverse. D'autant que leur comportement peut changer : «Souvent, ils refusent pour ne pas se distinguer par rapport aux groupes. Puis, à l’adolescence, l'envie revient, avec un retour aux sources pour justement se différencier du troupeau», révèle-t-elle. Enfin, une langue, c'est une culture, un lien avec les grands-parents. Ce n'est pas qu'une histoire de langage.
Source : Le Figaro