Cancre, dyslexique? Vous êtes peut-être kinesthésique

mar, 02/19/2019 - 12:45 -- siteadmin

 Dans son livre, «Dépasser les difficultés scolaires: ni cancre ni dyslexique... Peut-être kinesthésique?», Valentine Armbruster explique comment les jeunes doivent apprendre autrement pour vaincre leurs difficultés.

Valentine Armbruster a longtemps éprouvé des difficultés à l’école, avant de se rendre compte qu’elle était kinesthésique: elle perçoit la réalité à travers le mouvement, les sensations physiques ou émotionnelles. Devenue coach professionnelle, elle fait également de l’accompagnement individuel auprès d’élèves en difficulté. Son livre «Dépasser les difficultés scolaires: ni cancre ni dyslexique... Peut-être kinesthésique?» à destination des parents et des enseignants paraîtra le 21 février aux éditions Albin Michel.

LE FIGARO- Qu’est-ce que la kinesthésie?

Valentine ARMBRUSTER- La kinesthésie, c’est ce qui nous permet d’éprouver des sensations physiques internes (comme les émotions, les sensations) et externes (la perception du mouvement, par exemple). Dans l’apprentissage de la perception du monde, chacun utilise en priorité le sens avec lequel il est le plus à l’aise pour analyser et retenir l’information. On estime qu’environ 40 % de la population utilise en priorité la vue: on dit alors qu’ils sont visuels. Un autre 40% utilise leur ouïe: ils sont plutôt auditifs, tandis que 20% seulement sont kinesthésiques. Surtout, il faut comprendre que ce n’est ni un trouble, ni une maladie. Cela signifie simplement que nous avons besoin de faire pour comprendre et apprendre.

Comment savoir si je suis kinesthésique?

Les enfants kinesthésiques sont souvent très pragmatiques, un peu touche à tout, adroits, et à l’aise avec le mouvement. Ils préfèrent les contextes de mise en pratique. Dans leur façon de s’exprimer et de communiquer, ils font beaucoup référence à leur ressenti. Par exemple, si on leur demande d’expliquer une leçon qu’ils ont comprise, ils auront tendance à utiliser des objets ou des dessins.

Vous avez vous-même compris votre mode de fonctionnement très tard. Comment cela a-t-il affecté votre scolarité?

Je me suis beaucoup ennuyée à l’école. J’avais du mal à garder mon attention fixée sur le professeur, et rester assise à une table me demandait des efforts considérables. J’avais du mal à comprendre les concepts très abstraits ou théoriques. C’était une grande source de frustration car j’avais l’impression de ne rien apprendre. Quand on voit les autres mieux réussir, on se pose forcément des questions sur son intelligence. J’arrivais à maintenir mes notes au-dessus de la moyenne, mais c’était au prix d’efforts très importants. Durant mes études supérieures, j’ai écrit un mémoire de recherche sur la façon dont les techniques théâtrales et le développement personnel pouvaient s’appliquer en entreprise. Simultanément, je prenais des cours dans une école de coaching. C’est la pédagogie pratiquée dans cette école qui m’a fait prendre conscience d’une chose: d’un côté mon cursus universitaire classique était laborieux et de l’autre dans cette école qui me permettait d’expérimenter entre élèves et de mettre en pratique les concepts théoriques, j’intégrais tout très vite.

Quelles techniques d’enseignement sont les plus appropriées?

Tenter d’enseigner quelque chose à un enfant kinesthésique sans adapter son langage, c’est comme parler suédois à un enfant français et espérer qu’il comprenne. D’abord ,il faut que l’enfant puisse passer de la posture classique de l’apprenant passif à une posture plus active, grâce à un apprentissage davantage tourné vers la découverte, l’expérimentation et la manipulation d’objets. Par exemple, en grammaire, on peut travailler avec de petits bouts de papiers de couleur pour ordonner les mots et comprendre leur sens dans une phrase. En philosophie, on peut aussi commencer par les inciter à se poser des questions par rapport à eux-mêmes, à ce qu’ils vivent et ressentent. Travailler avec des chaises est aussi souvent utile pour ce type d’exercice. Lorsque l’enfant est assis sur la chaise, il doit parler de lui, et lorsqu’il est assis par terre, ou sur une autre chaise, il doit se mettre dans la peau de l’autre.

Faut-il changer la manière dont fonctionne l’école traditionnelle?

Je ne remets pas du tout en question les programmes scolaires, mais la manière d’enseigner. Je pense que faire en sorte que les élèves soient davantage actifs en classe pourrait bénéficier à tout le monde. Pour cela, l’idéal serait par exemple de réduire les effectifs de moitié dans les classes, et changer la disposition des tables. À la place des traditionnels rangs, regrouper quelques tables entre elles rendrait possible une circulation plus facile dans la salle pour permettre aux élèves de s’entraider. Pour des cours plus vivants, il serait mieux de demander aux élèves qui ont compris le cours de se mettre à la place de l’enseignement pour l’expliquer aux autres. C’est ludique, et cela ajoute un peu de vie. L’école doit accompagner les élèves dans leur découverte d’eux-mêmes. Je suis persuadée que le fait de pouvoir expérimenter, créer et être autonome pourrait davantage leur donner confiance en eux une fois arrivé à l’âge adulte.

Source : Le Figaro

https://etudiant.lefigaro.fr/article/difficultes-scolaires-vous-etes-peut-etre-kinesthesique_d5c3f9d4-304f-11e9-9f0e-0e92effe80a7/