Une nouvelle vidéo de Daech, dont les "acteurs" principaux sont deux garçons français qui exécutent des prisonniers syriens, a choqué les internautes aussi bien que les autorités. Le parquet de Paris ouvre une enquête. Un nouveau type de danger est au rendez-vous…
La Propagande signée Daech instrumentalise à nouveau les plus petits et l'innocence enfantine passe à la trappe, après la diffusion d'une vidéo où deux mineurs se présentant comme Français exécutent deux prisonniers syriens. Les 14 minutes de la vidéo sont bien scénarisées et le titre aussi poétique qu'effrayant, "Sur les traces de mon père", mène à se demander ce que va devenir cette nouvelle génération, allaitée aux idées djihadistes de ses parents.
Le plus âgé des deux n'a pas plus de 13 ans; il confie avoir vécu en France et se dit prêt à "faire une opération martyr" ou à aller en France pour se faire exploser et "venger le sang des musulmans." Le deuxième garçon s'exerce au tir sur les portraits des présidents français, russe et syrien. Les experts supposent que ce sont deux fils d'Abu Dujana al-Faransi, un djihadiste français tué près d'Alep en Syrie en avril 2014. La situation est alarmante, mais d'après Richard Labévière, journaliste, écrivain, rédacteur en chef de prochetmoyen-orient.ch, elle n'est pas une tendance pour autant:
« Aujourd'hui les services français, le ministère de l'Intérieur estiment que sont à peu près concernés entre 1000 et 1500 personnes par le phénomène de radicalisation susceptible d'amener ces gens en Irak. Là vous avez 30% de femmes, vous avez des célibataires, des gens seuls voire des familles. Donc si vous voulez à partir d'un exemple qui concerne des enfants il est difficile de bâtir une démonstration et d'en tirer une tendance lourde. Tout simplement ce qu'on peut dire c'est que sociologiquement on a du à mal à définir un profil très précis de ces personnes radicalisées. Il y a à la fois des gens de deuxième ou troisième génération d'immigration, maghrébine essentiellement c'est-à-dire Français d'origine maghrébine. Et puis une partie de Français convertis qui se sont radicalisés soit au contact de mosquée salafiste souvent financée par l'Arabie saoudite en France dans les quartiers sensibles et les banlieues, soit par Internet directement ou simplement par des contacts aléatoires plus personnels ou autres. »
Selon les dernières statistiques du ministère de l'Intérieur, 78 mineurs français se trouvent actuellement aux côtés des combattants de Daech. Les écoles pour enfants de djihadistes étrangers seraient mises à leur disposition, à Deir ez-Zor, à Raqqa en Syrie et à Mossoul, en Irak. Richard Labévière donne plus de détails sur ces établissements et leur fonctionnement:
« Non seulement il y a des écoles mais quand tous ces gens arrivent, essentiellement de Turquie, par des connexions qui souvent sont parfaitement connues des services turcs, ces personnes — femmes, enfants voire futurs combattants — sont prises en charge par des structures d'accueil tant militaires, de logistique que d'éducation c'est-à-dire qu'effectivement il y a un système de madrassas qui va leur enseigner le b.a.-ba ou la connaissance théologico-politique minimale du Coran, des hadiths et de la sunna. Parce que souvent — on l'a constaté en interviewant des djihadistes français de retour de Syrie — ces personnes se caractérisent par une ignorance presque totale de la religion musulmane, de ses écrits et de ses principes. Donc il est clair que Daech a dans son organisation non seulement un secteur de communication très élaboré pour recruter des gens sur Internet mais également sur place anime une série de madrassas, d'écoles coraniques, de centres de formation, centres de formation pour les femmes, les campagnes de combattants qui souvent sont transformées, vendues comme esclaves sexuels pour les combattants, soit pour les combattants eux-mêmes qui souvent, je le répète, ont une connaissance très approximative de la religion musulmane et de ses principes. »
Le parquet de Paris a ouvert une enquête judiciaire en réponse à cette diffusion et pourtant ce n'est pas la première fois que Daech laisse un enfant français, en tout cas présenté comme tel et parlant français, mener une exécution. En mars 2015, une vidéo similaire était parue sur internet mettant en scène un garçon d'une dizaine d'années. Selon Richard Labévière, l'enquête n'a pas été ouverte plus tôt à cause de lenteurs des services français, mais le problème crucial se trouve ailleurs:
« Le problème concerne pas seulement la France mais d'une manière plus large, je dirais, tout ce qui concerne les sites incitant à la violence et à la radicalisation — les sites, les journaux, les revues qui jouissent d'impunité sur les réseaux dits sociaux et toutes les possibilités de la nouvelle technologie numérique à travers Internet et les réseaux comme Twitter, Facebook et autres. Donc le problème, il envoie à une carence de législation internationale et de régulation internationale sur la plupart des moyens de la technologie numérique. »
Pendant que les services français mènent l'enquête, il reste à espérer que la fausse réalité, créée par Daech dans les têtes de ces enfants ne va pas contaminer encore plus d'esprits innocents.
Source : Sputniknews