Violence contre les Enfants: L’infanticide

De nombreuses sociétés, comme les Grecques, les Chinois, les Japonais, les Inuits, ainsi que les populations de l’Inde, du Brésil, d’Angleterre, d’Italie et de France, entre autres, ont exercé la pratique de l’infanticide, définie comme la mort d’un enfant de moins de douze mois. Un auteur présente l’argument que, pendant une grande partie de l’histoire de l’humanité, l’infanticide fut l’une des méthodes de contrôle de la population les plus répandues. Certaines sociétés ont très peu de connaissances sur ce qu’est l’infanticide parce qu’il est très peu probable que les populations discutent ouvertement de cette pratique et il est très rare que les informations liées à cette pratique soient divulguées. Qui plus est, il arrive que les membres de la communauté et les professionnels de la santé « ne remarquent pas » la mort d’un bébé avant son premier anniversaire. On distingue parfois l’infanticide actif, c.-à-d. tuer intentionnellement, de l’infanticide passif, mort suite à une négligence médicale, nutritionnelle, physique ou émotionnelle.

On sait, par exemple, qu’en Inde ou en Chine, l’infanticide est une pratique commune exercée sur les filles à cause de la prédominance de la préférence pour les enfants de sexe masculin. L’étude de l’ONU sur la violence contre les enfants cite une étude menée en Inde sur un millier de femmes qui ont répondu à des questions sur leurs résultats de grossesse. Cette étude a montré que quarante et un pour cent des morts précoces et néo-natales de bébé de sexe féminin résultent d’un infanticide de bébés filles. Une étude entreprise dans l’état de Tamil Nadu a estimé que huit à dix pour cent des morts de bébés en 1995 auraient été liés à des infanticides de bébés filles. La conclusion de cette étude est la suivante : «Une recherche plus approfondie est nécessaire afin de mieux comprendre la nature et l’étendue du phénomène à travers le pays». D’après Sahni et al. , les infanticides ayant lieu souvent dans les premiers jours après la naissance sont déclarés soit comme des cas de mort-nés ou ne sont pas déclarés du tout dans un système d’enregistrement des naissances qui n’est pas adéquat. La préférence pour les fils amoindrit les chances de survie à la naissance des bébés filles, d’une part, mais cela signifie également que les fillettes risquent davantage d’être ignorées, négligées et abusées dans leur vie future.

Toutefois, l’infanticide constitue également un problème de taille dans d’autres pays. Il a été révélé dans les Observations concluantes sur le Bénin du Comité sur les Droits de l’enfant (para. 30) que l’infanticide de soi-disant «enfants sorciers », d’enfants handicapés/à mobilité réduite, d’enfants nés par le siège (lorsque le bébé entre dans le canal de naissance le derrière ou les pieds en premier plutôt qu’avec la tête en avant), continue d’être une pratique commune au sein de certaines communautés. On peut inclure dans les autres raisons qui poussent à l’infanticide « le désir de contrôler la taille et la composition de la famille, de maximiser les chances de reproduction réussies et d’assurer la stabilité sociale». Certains parents choisissent de s’investir dans une progéniture déjà en bonne santé, alors qu’aux Etats-Unis, par exemple, les deuxièmes enfants ou les suivants, qui naissent d’une mère plus jeune et moins éduquée, courent plus de risques. En effet, l’absence de soins prénataux constitue également un facteur risque.

Une étude sur les Aymara, hommes et femmes des Andes boliviennes, a également montré un taux d’infanticide plus élevé chez les filles qui pourrait être expliqué par des raisons biologiques (difformités et gémellité) et sociales (naissance illégitime, taille de la famille et pauvreté). L’étude a montré qu’en règle générale, «  les communautés ne condamnent pas les mises à mort lorsqu’elles sont effectuées pour des raisons biologiques, en revanche les mises à mort pour des raisons sociales ne sont que très rarement justifiables ». Les auteurs de l’étude sont de l’avis que, contrairement aux thèses occidentales sur les filicides (meurtre de son propre enfant), « ce n’est pas nécessairement un crime aléatoire et imprévisible commis par des femmes malades mentalement. Dans presque tous les cas, les parents, auteurs de filicide, ne peuvent élever d’enfants dans les circonstances dictées par leur position spatio-temporelle ».

Le Comité sur le Droit des enfants a, à plusieurs reprises, fait référence à l’infanticide dans ses Observations concluantes adressées à différents pays, dont la Fédération russe (2005), les Maldives (2007), le Niger (2002), la Chine (2005) et l’Inde (2000).

Comment lutter contre ?

Des programmes et des initiatives varient selon le contexte culturel et commencent par l’éducation des membres de la communauté sur les alternatives à l’infanticide. D’après de Hilari et al. , «en ce qui concerne le programme, les personnes responsables de le planifier et de le mettre en place devraient cibler les groupes ethniques dont le niveau d’infanticide est élevé, former le personnel soignant à détecter les signaux d’alarme multiples de l’infanticide et à réagir face à ceux-ci (notamment, la violence domestique et la maltraitance des enfants)».

Alors que la tentation pourrait être de porter le blâme sur les « mauvais » parents ou les parents « instables », plus particulièrement les mères, les initiatives pour lutter contre cette pratique doivent intégrer à l’économie et à la société le côté de la pratique liée au sexe. Ainsi, les solutions à ce problème seront que très rarement faciles. Par exemple, en ce qui concerne les infanticides de bébés filles, Zeng et al. écrivent :

« Le principe d’égalité entre les hommes et les femmes devrait être plus largement promu dans les medias pour pouvoir changer les attitudes qui mettent la préférence sur la progéniture masculine, et renforcent la prise de conscience du public à ce problème. Ce principe devrait également se refléter dans certaines politiques sociales et économiques spécifiques dans le but de sauvegarder les droits de base des femmes et des enfants, surtout chez les enfants de sexe féminin. […] Des règlementations gouvernementales qui interdisent le recours à des techniques de reconnaissance du sexe avant la naissance doivent être mises en place, et toute personne violant cette loi doit être punie en conséquence. […] Les programmes de planning familial devront se concentrer sur une éducation efficace du public, un bon organe d’accompagnement et de prestation de services, ainsi que la participation de la communauté et des individus, entièrement volontaire, pour augmenter la fréquence d’utilisation des contraceptifs, réduire les grossesses imprévues et minimiser la nécessité de recourir à un avortement provoqué».

Source : CRIN

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